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#ThePoliticianWeWant : Itaba ou comment renaître de ses cendres

Plus longue que large, Itaba est l’une des communes de la province de Gitega qui a terriblement souffert de la guerre civile, mais qui, petit à petit, revit.

Avec un groupe de choristes, nous étions à Itaba pour une visite pastorale. Via la RN8, après avoir fait 24 kilomètres séparant la ville de Gitega de la commune Makebuko, nous bifurquons à gauche sur la RN13 pour Itaba. En bus, le paysage, alternant monts habités et vallées cultivables est envoûtant. 

Sur les collines qui surplombent la vallée de Nyakidogo, les activités champêtres vont bon train. Des silhouettes courbées sur des houes sont aperçues de loin. La commune, plus longue que large, longe le bas du mont Cene, jusqu’au marais de la rivière Nyakijanda. « Comme il est allongé tout le long et en bas du mont, mw’itaba ry’umusozi wa Cene, cela est à l’origine du nom de la commune », raconte un vieillard rencontré à Gihamagara.

Stigmates

À l’entrée de la zone Gihamagara, un monument peu luisant attire les visiteurs. On ne peut pas le rater. Ce monument est le symbole d’un gâchis : 275 civils hutus ont été tués par l’armée régulière le 9 septembre 2002. Pourtant, rien ne montre que l’endroit évoque un drame pareil. Rien. Autour des dalles en béton armé, soutenu par trois colonnes surmontées par une croix, de l’herbe sauvage et des détritus ici et là. Et pour narguer la symbolique, du linge sèche sur la haie qui entoure en partie le monument.

Claude, 27 ans, est originaire de Kanyonga. Pour lui, la négligence dans la prise en charge de ce monument s’explique par le fait que les gens de Gihamagara ne semblent pas croire vraiment dans le monument construit en 2005. « C’est un geste purement politique vu qu’aucune autre cérémonie en leur mémoire n’a été faite, à part celle du jour de l’inauguration », dit Claude, avant de renchérir que ce monument aurait dû être construit à Kanyonga, le lieu du massacre. Pour Pauline, le visage vif, 23 ans, l’essentiel est d’avoir un dirigeant aux mains innocentes, pour que « les auteurs des différents crimes qui ont endeuillé notre pays soient connus, reconnaissent leurs crimes, se repentent et demandent pardon pour la réconciliation nationale ».

Renaissance

Malgré ces stigmates, on ne peut qu’être admiratif de la reconstruction de la commune. À côté du monument, le nouveau marché de Gihamagara est flambant neuf. Nous avons eu la chance d’y être un mardi, le jour du marché. « Regardez, même si le marché grouille de monde, il y a absence de jeunes intellectuels, le chômage les a contraint à l’exode vers la Tanzanie pour survivre », témoigne Clotaire, un catéchiste de 32 ans. Pour lui, un bon dirigeant doit tout faire pour lutter contre la fuite des cerveaux, lutter contre le népotisme qui sévit à Itaba dans l’octroi de l’emploi, et avoir un programme solide de lutte contre le chômage qui handicape les jeunes d’Itaba.

Plus loin, un joli stade a été construit et le mélange des couleurs rouge, jaune et bleu, caresse nos les yeux. Le stade porte le nom qui exprime le rêve des gens de la commune : « Stade Espoir d’Itaba ». Sur le chemin du retour, on croise une vielle maman, qui semble très asthénique. C’est une Mutwakazi de la colline Kibogoye. « Il n’existe que 4 centres de santé qui traitent les patients, mais pas d’hôpital. », explique Anastasie 20 ans, cultivatrice, qui accompagne la vielle maman. Anastasie aimerait avoir un dirigeant ouvert d’esprit qui fera d’Itaba une contrée semi-urbaine, en construisant au moins un hôpital et des hôtels. Comme il y avait une place dans notre voiture, on décide de la prendre en lift. En cours de route, Anastasie exprime son souhait d’avoir un administrateur Mutwa et plus de Twa dans les instances décisionnelles, car ils en ont et font eux aussi, partie de la composante burundaise. Arrivés au centre de santé Runazi, une infirmière rencontrée aux urgences nous glisse un petit clin d’œil. « Les personnes âgées sont totalement oubliées et la gratuité des soins pour cette catégorie d’âge serait salutaire pour eux en 2020 », confie-t-elle, avant de nous dire au revoir.

D’une superficie de 222 Km² avec une population de 63 307 habitants, Itaba est l’une des 11 communes de la province de Gitega. Elle a une densité de 285 habitants/Km². Elle se trouve à cheval sur deux régions naturelles, entre le Kirimiro à l’ouest et le Buyogoma à l’est. Itaba est délimitée au nord, au sud et dans sa partie occidentale par les communes de Gitega, Makebuko et Bukirasazi. À l’est, elle forme la frontière avec la commune Butaganzwa (Ruyigi) au nord, et Musongati vers le sud et le sud-est. Elle est constituée de 20 collines reparties dans trois zones à savoir Buhevyi, Gihamagara et Itaba, et vit principalement de l’agriculture et de l’élevage.

 

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