Lauréate du prix de la première commune la plus performante, deux fois consécutives en 2017 et 2018, Rugazi est cette commune qui tire son origine dans les palmiers à huile qui la caractérise. Elle s’exprime.
Au départ, c’est une visite chez une ancienne amie de classe. À 15 kilomètres de Bujumbura, sur la RN9, une énorme plantation de palmiers à l’huile frappe mon regard. « Bienvenu dans la commune Rugazi », lis-je sur la petite pancarte en bois, plantée au bord de la rivière Muzazi.
À première vue, dès l’entrée dans la zone Muzinda de cette commune, Rugazi apparaît comme une contrée semi-urbaine très fréquentée : les voitures de transport en commun « Probox » font des navettes entre Muzinda et Bujumbura. La cadence des rotations de ces Probox reflète le dynamisme de l’activité économique de Muzinda. Mais, plus on pénètre au chef-lieu de la commune, à 11 km de la RN9, plus Rugazi devient une contrée rurale. Monts et vallées, couverts d’une verdure éclatante, se succèdent. Ruce, la zone la plus reculée, est couverte d’une multitude de pins. Plus loin, la forêt naturelle de la Kibira se laisse bien voir.
La libre-entreprise, une urgence
Dans ces navettes de Probox, les habitants de Bujumbura ne rechignent pas à aller s’approvisionner à Muzinda. Ce dimanche-là, le marché de Muzinda, jadis connue comme la grande soupape par où se déversait le trop-plein du bétail du territoire d’Usumbura vers la colonie du Congo-Belge, grouille de monde. Mon regard se pose sur une jeune fille, devant une glacière. Regard désolé, criant dans toutes les directions, « Nshorera dada! », Aïcha, est une commerçante de glaces depuis 2015.
« C’est difficile de tout vendre ici. Mais, vu que je n’ai pas continué mes études par pauvreté de mes parents, ce commerce est mon seul espoir ». Pour cette jeune fille de 19 ans, originaire de la zone Ruce et ayant maintenant l’âge de voter, un dirigeant digne de ce nom serait quelqu’un qui se soucie vraiment du bien-être de ses dirigés. « Un bon climat politique, la promotion de petites et moyennes entreprises, voir la banque des jeunes devenir une réalité. Voici mes attentes de la part de l’heureux élu », confie Aïcha.
L’éducation, une priorité
Dans l’après-midi, mon amie me fait visiter l’école Choi Jung Sook Girl’s high school de Muzinda, une école à régime d’internat qui accueillera uniquement des filles pour la section de transformation agro-alimentaire. Adidja, 18 ans, est l’une des élèves. Elle a vu ses sœurs et voisines maltraitées et négligées par leurs conjoints. La raison ? « Le manque d’éducation », assure-t-elle, d’un air maussade, avant de renchérir que l’éducation est le pilier de tout développement. Un bon dirigeant, selon elle, serait celui qui veillera à restaurer le niveau intellectuel au Burundi, lutter contre la fuite des cerveaux, et faire même revenir ceux qui sont déjà parti pour la construction du pays.
À 16h, je suis au snack bar Lianny. Parking étroit pour cinq voitures, gazon frais et vert, chaises plastiques regroupées autour des tables, ce bar moderne a tout pour attirer les amateurs des selfies. Jadis abritant les concerts des grands noms de la musique burundaise, ce bar est actuellement un luxueux ligala des chômeurs. Kazoviyo, 26 ans est l’un d’eux. Ayant terminé ces études, il y a deux ans. « Décrocher un travail sans la fameuse expérience est un rêve qui ne devient réalité que pour les élus, ou pour qui, il y a un oncle qui y mets un coup de pouce», confie-t-il, avant d’ajouter qu’il rêve d’un leader qui prendra en main les problèmes des jeunes, tranche majoritaire de la population burundaise. « Tant pis, je ne suis pas le seul à désespérer, ce qui m’inquiète dans tout ça, ce que ne sais pas comment je vais fonder une famille sans ressources », conclut Kazoviyo, avant de rejoindre son groupe pour fumer des clopes.
La commune Rugazi est l’une des cinq communes de la province Bubanza. Sa superficie est de 157,58 km² et elle est limitée au nord par la commune Musigati, à l’ouest par la commune Mpanda, au sud par la commune Mutimbuzi et à l’est par la commune Muramvya. Elle s’étale sur trois régions naturelles, à savoir l’Imbo, les Mirwa, et le Mugamba. Elle est composée de 14 collines, subdivisées en trois zones : Rugazi, Ruce et Muzinda. Sa population est estimée à 62 237 habitants, avec une densité de 395 habitants/km². L’économie de Rugazi repose principalement sur l’agriculture, l’élevage, le commerce et l’exploitation forestière.