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Burundi : la « fuite de cerveaux » en question…

Une main d’origine burundaise est derrière la mise sur pied du Boeing 777X, qui a fait son premier vol le 25 janvier, avec succès. Depuis, une multitude de questions me taraudent : nos dirigeants connaissent-ils les raisons qui motivent ces cerveaux à partir et ne plus revenir ? Se rendent-ils vraiment compte que cette fuite est une véritable saignée pour un pays qui peine à amorcer un réel développement ?

« Avant, l’Europe pour moi n’était pas une priorité ». Lui, c’est Dr Fabien*. Après sa licence en biologie à l’université du Burundi, il espérait avoir un emploi, mais que nenni. « Pour ne pas perdre de temps, j’ai cherché une bourse en ligne et je me suis inscrit en médecine à l’Università Politecnica Delle Marche en Italie, car je voyais que ceux qui ont une chance d’obtenir un poste dans la fonction publique, au Burundi, étaient des médecins », raconte Fabien. 

Une fois arrivé en Europe, le Burundi n’est plus sa priorité. « La question de rentrer au pays après l’obtention de mon diplôme n’est pas d’actualité. J’ai vécu 28 ans au Burundi, et je sais parfaitement ce que ça fait de vivre sans option alors qu’ici on reconnaît mes compétences, je peux travailler, avoir une vie formidable, un boulot à contrat indéterminé et bien rémunéré », m’écrit par émail, Dr Fabien.

Une réflexion répandue

La réalité est là. Le Burundi ne cesse de se vider de sa matière grise et de ses compétences. La loterie de la Green-Card américaine, les politiques d’immigration canadienne, les bourses des grandes universités de renom,… poussent les jeunes burundais à partir. Les cas des Burundais très diplômés, qui contribuent à la prospérité d’autres pays, sont légion. Le récent cas est celui d’Ir Georges Ndayizeye. Natif de Makamba, il figure parmi l’équipe qui a mis sur pied le nouvel appareil bleu blanc, le Boeing américain 777X. Souvenez-vous, le Burundi n’a même pas de compagnie aérienne.

Des grands professeurs comme Léonce Ndikumana à l’université du Massachusetts et Dr Jeanine Ntihirageza, professeur à l’université d’Illinois, ne sont qu’une goutte dans un océan d’autres grands cerveaux qu’a perdus le pays. Ils sont tous en train de vendre leur talent dans des universités américaines ou autres, pendant que celles de notre pays croupissent dans un océan de problèmes, dont le manque d’enseignants. Alors que les médecins spécialistes sont une perle rare dans nos hôpitaux publics, ils étaient plus de 100 médecins spécialistes burundais exerçant en France, en 2017.

Le diable est dans les détails

« Les cerveaux burundais, sont-ils ingrats avec leur mère patrie ? », m’avait demandé un ami, en lisant un billet de Yaga sur les causes de l’exode des médecins burundais. Ma réponse fut simple : « Le diable est dans les détails ». En effet, le chômage, l’exil, le manque de bien-être social, la pauvreté, la crainte pour leur sécurité, la mauvaise gouvernance qui se traduit par le népotisme, sont certains maux qui encouragent cette fuite. « Ici, je n’ai pas besoin d’un tonton haut placé pour avoir un bon emploi », a ainsi publié Niyonkuru, un Burundais vivant au Canada sur sa page Twitter.

Outre les maigres avantages que gagne le pays via les transferts d’argent, renverser la tendance afin d’offrir un environnement attractif, aussi bien à la diaspora désirant revenir qu’aux résidents devant être convaincus de rester sur place, est un remède que doit concocter nos dirigeants. Cela implique des réformes institutionnelles pour promouvoir l’amour de la patrie, un environnement favorable sur le plan de l’emploi, des investissements, de la sécurité, la bonne politique économique, la valorisation du mérite et de la compétence, la stabilité politique et la protection des droits et libertés. Tel est mon humble souhait pour les nouveaux dirigeants de 2020.

 

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