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Les origines du premier roi du Burundi : entre mythes et histoire

Avant la fondation de la monarchie, il y avait au Burundi une multitude de royautés. Ces derniers seront unifiés par Ntare Rushatsi, le roi qualifié de fondateur du royaume du Burundi. Mais alors, d’où est venu ce monarque fondateur ?

« Si l’on considère l’ensemble des sources orales clairement identifiées comme telles, on constate qu’environ 150 récits ont été recueillis sur les origines de la royauté burundaise. […] », peut-on lire dans Histoire du Burundi, des origines à la fin du XIXème siècle. De ces 150 récits, il faut souligner que les quelques 120 consacrés spécialement au roi fondateur se répartissent de manière très inégale en deux groupes : le cycle de Nkoma et le cycle de Kanyaru. Ceci d’après les lieux où se seraient déroulés les épisodes décisifs de la naissance de la royauté. Et sur ce point, celui de Nkoma semble être privilégié.

Buha, là où tout aurait commencé 

On vient de le voir, le cycle de Nkoma est ce qu’il y a de plus vraisemblable comme hypothèse sur les origines du premier roi du Burundi. Non sans raison car il est le mieux représenté dans les traditions burundaises avec une centaine de versions recueillies dans différentes régions, essentiellement au centre, au sud et au sud-est. Ce cycle de Nkoma repose sur trois séquences, toutes hypothétiques. Deux personnages d’abord : Jabwe et Nsoro. Ces derniers se trouvent être les fils d’un certain Ntwero. Un jour à l’occasion d’une chasse, Jabwe, pour échapper à un orage, va s’abriter dans l’enclos de Gashinyira où se trouvait seule l’épouse de son frère Nsoro. Ils couchent ensemble. De cette union naîtra l’enfant qui sera le futur Ntare. Plus tard, Jabwe obtiendra que son fils naturel lui rende visite. Il refuse toutefois de le rendre à Nsoro. Mais ce dernier le fait enlever et l’emmène jusqu’au Buha, pays dont le roi avait épousé une certaine Inamabuye, sœur de Jabwe et Nsoro.

On le voit ensuite, l’enfant, futur Ntare est hébergé clandestinement chez sa tante. Le mari de celle-ci se trouve être un roi du Buha méridional. Il s’appelle tantôt Ruhaga tantôt Ruhinda. Le jeune homme travaille comme simple berger à la cour du roi. Il reçoit le nom de Cambarantama en référence à la peau de mouton dont il est revêtu. 

Les événements se précipitent à l’arrivée de devins venus secrètement du Burundi pour voir celui qui sauverait le pays du chaos dans lequel il était plongé. Le jeune homme s’enfuira avec ces devins et quelques fidèles, direction Nkoma. Il se présente comme le sauveur du Burundi appelé à gouverner le pays.

Enfin, la proclamation royale à Nkoma n’est qu’une première étape dans la marche triomphante de Ntare Rushatsi vers les hauteurs du Mugamba central.

Mais Ntare doit d’abord éliminer son propre père Jabwe qui régnait sur les Sud du Mugamba. Mis à part cet épisode, l’expédition de Ntare vers le nord-ouest prend la forme d’une sorte de pèlerinage. Il part du Nkoma pour rejoindre Kigwa sur la rive gauche de la Ruvyironza et se dirige ensuite vers les fameuses collines royales de Kiganda, Mbuye, Muramvya et Bukeye. Ici, il est dit qu’avant d’être intronisé, le nouveau roi aurait triomphé de la reine Inakibindigiri à l’issue d’une course sur le mont Banga.

Quid du cycle de la Kanyaru ?

Preuve de sa faiblesse, ce cycle se réduit à une vingtaine de versions recueillies au nord du pays. Et de ce cycle, deux séquences se détachent.

Dans un premier temps, le jeune Cambarantama garde les vaches et ramasse les bois de chauffage d’un puissant magicien rwandais, Mashira, dont l’épouse est sa tante. Celle-ci aide le jeune berger à subtiliser une prophétie le concernant : en poussant le bétail sur le champ d’éleusine du magicien, il amène ce dernier à lui faire savoir qu’il peut devenir roi en se faisant forger des armes et en traversant la Kanyaru pour aller tuer un fauve au Burundi.

Justement, et c’est dans un second temps, tout se passe comme prévu. Ayant traversé la rivière, le futur roi trouve sur le rocher de Nyamirango un fauve qui terrorise le pays. Il tue la bête et redistribue la moitié des offrandes. Le peuple s’empare de lui et l’emmène au mont Remera de Nini près de Gashikanwa où il est proclamé mwami. La pluie revient et la famine cesse.

De la légende à l’histoire

Finalement, il n’est pas impossible que Ntare fut un conquérant venu des régions méridionales, un dissident du Buha dans les parages de la rivière Malagarazi. Mais rien n’est sûr, car, comme on le voit, le roi vient aussi d’ailleurs. On le fait venir aussi bien du nord, de l’est, du sud, de l’ouest, que du ciel ou de l’intérieur de la terre. 

Surtout que, comme l’écrit Jean Pierre Chrétien, les problèmes d’interprétations historiques sont particulièrement délicates en ce qui concerne les récits de la fondation ou de l’origine vu l’ancienneté des faits évoqués. On ne fait donc que nager entre le mythique et l’historique. 

 

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