Site icon LE JOURNAL.AFRICA

Melchior Ndadaye, le président féministe

Ce lundi, le Burundi  a commémoré le 26ème anniversaire de l’assassinat du président Melchior Ndadaye. Cette personnalité est non seulement le héros de la démocratie, mais aussi le promoteur de l’image de la femme au Burundi. Certes, son régime n’a duré que trois mois, mais ce fut une période suffisante pour enclencher la machine des réformes en faveur des femmes.

Longtemps oubliées, Melchior Ndadaye est le premier président à reconnaître la valeur des femmes. Sous son régime pour la toute première fois dans l’histoire du Burundi, une femme Sylvie Kinigi est nommée Premier ministre. Le succès des femmes continue avec la nomination de Vestine Mbundagu, première gouverneure à la tête de la province de Cankuzo.

Une nouvelle ère voit également le jour dans l’armée. Le tabou est levé, les femmes sont désormais autorisées à faire partie de cette institution. La première promotion mixte fait son entrée à l’Institut supérieur des cadres militaires ISCAM.

Régression

26 ans après l’assassinat du président Melchior Ndadaye, la place de la femme dans les postes de prise de décision a tendance à régresser. Sous le régime Ndadaye, en 1993, le Burundi a connu une femme numéro deux à la tête du pays. Après son assassinat, aucune d’entre elles n’a fait partie des décideurs au premier degré jusqu’en 2005. Après la victoire du CNDD-FDD, une lueur d’espoir remplit le cœur des femmes avec la nomination d’Alice Nzomukunda succédé par Marina Barampama comme 2ème vice-présidente de la République et d’Immaculé Nahayo, présidente de l’Assemblée nationale.

Cependant, cette lueur d’espoir se dissipe peu à peu. La Constitution en vigueur accorde 30% de femmes dans les institutions. Les différentes études réalisées ont montré que ces 30%  sont surtout respectés dans les postes électifs (Assemblée nationale, le Sénat, les administratifs communaux) et non dans les postes nominatifs (directeurs généraux, médecins provinciaux, directeurs provinciaux de l’enseignement…). 

En 2011 dans une étude faite par PNUD, les femmes occupent moins de 20 % des 326 postes de hauts fonctionnaires au sein de l’administration centrale et des entreprises publiques (ministres, chefs de cabinet, directeurs généraux, chefs de département et ambassadeurs). Pour l’ensemble des ministères, leur taux de représentation n’est en effet que de 18,47%. 

L’étude de l’Association des femmes rapatriées du Burundi AFRABU montre en 2016 que le taux global de représentation des femmes est de 17 %.  Dans les ministères, d’après son étude, le quota pour la représentation féminine est de 25%, alors que celle-ci ne dépasse pas 10% pour les postes de secrétaires permanents. Dans l’armée, le quota féminin au niveau de la haute hiérarchie n’est que de 2% puisque sur les 178 hauts cadres de la Force de défense nationale (FDN), seulement 3 sont des femmes.

Les entraves à la promotion du genre

Les femmes sont plus de 52%, en se basant sur le recensement de la population de 2008. Bien que leur place soit mentionnée dans la Constitution, l’absence des textes d’accompagnement est une lacune non négligeable.  Leur intégration dans les postes de prise de décision relève du choix du gouvernement car il n’existe pas des lois contraignantes.

Hormis les décrets et les ordonnances, la plupart des textes sont votés par les députés et les sénateurs. Parmi eux, les 30% de femmes sont respectés. Malheureusement, ces dernières ne font pas souvent le poids face aux hommes. En plus d’être peu nombreuses, les intérêts du parti auquel elles doivent leurs postes priment sur ceux des femmes qu’elles sont censées représenter. 

Le Burundi est une république démocratique. Ces gouvernants devraient emboîter le pas à son héros en  respectant les quotas tels que prévus dans la Constitution. Pourquoi pas aller au delà, puisque les femmes sont majoritaires ?

 

Quitter la version mobile