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À quoi ressemble la vie d’un aveugle au Burundi ?

Alors qu’en 2018 il y avait 35 316 Burundais aveugles et 113 014 malvoyants, une question me turlupine : comment vit-on la cécité au Burundi ? Coup de projecteur sur ce handicap en cette journée mondiale dédiée à la vue.

La cécité est une réalité au Burundi. Nous sommes au marché de Gitega. Il est 8h. Un homme, la vingtaine, canne en bambou dans la main, se tient debout en bordure de route. Avec sa canne, ça se voit qu’il est aveugle. Ça fait plus de 10 minutes qu’il cherche à traverser la route. Il zigzague, mais les conducteurs de motos et véhicules ne cessent de circuler. Les klaxons fusent de toute part. « Si tu ne vois pas bien, il faut rester chez toi », lance un conducteur de taxi qui a failli l’écraser. 

Par pitié, je m’approche pour l’aider à traverser. « C’est comme ça que je souffre tous les jours », se désole l’inconnu aveugle. J’apprends qu’il s’appelle Salvator, et qu’il vit grâce à la mendicité. Rejeté par sa famille car considéré comme un fardeau, il a été réduit à la mendicité. 

La scolarité n’est pas en reste

Pour plusieurs parents, la scolarité des enfants aveugles ou malvoyants n’est pas une priorité. Cela, pour la simple raison qu’ils ne voient pas l’intérêt. Salvator témoigne que quand il était encore enfant, et qu’il voulait aller à l’école, sa mère lui a dit : « Tes frères, qui voient clairement, ne cessent d’abandonner l’école. Toi qui es aveugle, tu crois pouvoir y aller et réussir ? ». Son rêve brisé, il fut anéanti, condamné à l’analphabétisme, et par avance au chômage.

Même son de cloche pour ceux qui ont eu la chance de fréquenter l’école. Régis, avec lunettes de soleil masquant ses yeux, est aveugle. Il est en seconde au Lycée Notre Dame de la Sagesse. Pour lui, la grande difficulté est d’avoir à temps, les notes en braille, pour bien préparer les interrogations. « Ne pouvant pas prendre les notes écrites au tableau, je profite du repos des autres élèves pour emprunter les cahiers et transcrire les cours avec l’aide des professeurs spécialistes en braille ». Un grand défi selon Régis. Par ailleurs, il témoigne que la nuit, il lui est difficile de réveiller un autre lycéen pour lui demander de le conduire jusque dans les toilettes. « S’il est gentil, il peut te guider, mais pas tous les jours ».

Un handicap surmontable

Un aveugle tenant un bâton le liant à la personne devant lui est un spectacle courant. Quand un parent est aveugle, souvent, ce sont les enfants ou les petits-enfants qui doivent s’en occuper. Et souvent, ces enfants ne vont pas à l’école. Leur éducation est alors sacrifiée. « J’aurais bien aimé  aller à l’école comme les autres enfants, mais je suis obligé d’être le guide et les yeux de mon père aveugle ». Telles sont les propos du petit Balthazar, 8 ans, « pris en otage » par son parent aveugle.

À partir du moment où l’on donne à la personne aveugle les outils qui lui permettent d’écrire et de lire, le handicap visuel est surmontable. Le Lycée Notre Dame de la Sagesse, le centre Urumuri de Gitega ou le centre Kanura de Gihanga en témoignent. Et d’ailleurs, le musicien Vichou du groupe « Peace and Love », et Daniel Ntiranyibagira le premier malvoyant burundais étudiant à l’université, sont la preuve qu’un aveugle peut bien réussir dans sa vie.

 

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