Des couples burundais vivent séparés. Légalement mariés, fiancés ou juste en relation amoureuse, ils peinent parfois à se revoir. Alors que certains vivent cette situation normalement, les autres changent radicalement de qualité de vie. Témoignages.
Certaines personnes ne vivent pas avec leurs conjoints. Les raisons de ces séparations sont soit familiales, soit professionnelles ou autres. Cette vie parait plus facile en zones rurales qu’en zones urbaines. Mais avant de prendre cette décision, les couples discutent sur l’attitude à adopter tout au long de la période de séparation. Malgré cette discussion préalable, le célibat géographique n’est pas consensuel, il est juste contraint. Selon des témoignages de couples ayant connu cette situation, il faut accorder le privilège aux enfants dans leurs conditions de vie qu’à la vie du couple.
Éloi* fut un jeune marié vivant à Bujumbura. Il dit avoir eu un embarras de choix quand sa femme lui a annoncé qu’elle devait se rendre en Europe pour une formation professionnelle d’une année. « C’était une nuit agitée ce soir. Elle m’a informé qu’elle est envoyée à l’extérieur du pays pour des raisons de travail. Trois mois après notre mariage, j’ai connu le tourment. Je ne voyais pas sur quelle option porter mon choix. Une année sans elle, ça n’a pas été chose facile », se rappelle cet homme aujourd’hui père d’un enfant. Il raconte les difficultés éprouvées en cas de besoin sexuel et moral. Selon lui, la solitude n’est pas, dans ce cas, écartée. Pire encore, souligne-t-il, c’est la vie en continence. Il affirme aussi avoir fréquenté d’autres filles pendant cette période.
Alida* vit aujourd’hui la situation d’éloignement géographique. Elle est partie en une longue mission de travail à l’extérieur du pays, laissant son mari et ses enfants au pays. Sa vie, témoigne-t-elle, n’a pas été facile. « A la tombée de la nuit, allongée dans le lit, j’ai souvent des pensées morbides. Mais la communication via Skype apporte un peu de réconfort. On se parle jusqu’à sentir la chaleur », confie-t-elle. Mais la suite est lettre morte.
Une situation qui varie selon les individus
A contrario, une femme de Bubanza mariée à un militaire se trouvant en mission de maintien de la paix à l’extérieur du pays dit être à l’aise dans la gestion quotidienne de cette relation à distance. « Je n’ai jamais été bousculée par cette distance. Je suis avec les enfants. Je me débrouille normalement et quand il me manque, on se parle via le téléphone qu’il m’a acheté avant de partir », raconte-t-elle.
À part ces séparations temporaires et surtout à longue distance, certains couples burundais ne vivent nécessairement pas ensemble en mairie de Bujumbura. L’époux ou l’épouse est parfois affecté à l’intérieur du pays par son employeur. Il s’agit de la double résidence, qui consiste à travailler la semaine puis rentrer le week-end.
Béni Ndayishimiye, conseiller conjugal et sexologue explique que le célibat géographique dont les raisons sont soit professionnelles, soit académiques, est très risqué. « Il met en cause la relation amoureuse. De surcroît, il gonfle le sentiment de regret. Avec le manque répétitif et l’incomplétude, bonjour l’infidélité », avertit le sexologue. En tout état de cause, il conseille les couples en telle situation à garder la « communion d’esprit » et de privilégier une communication riche en images afin d’apaiser la souffrance relationnelle.
Le célibataire géographique est une séparation qui fait que l’étayage du couple soit ébranlé et qui dévoile la relation. Mais pour s’en sortir, il ne faut pas aller loin de l’avis de l’écrivain français Frédéric Beigbeder : « L‘amour doit être passionnel, inconditionnel, fusionnel et jaloux. Quitte à durer peu. » Ou pas.