La sexualité fait partie du cycle de notre vie. Nous naissons, nous grandissons, nous nous reproduisons (parfois) et nous mourons. Il est donc indispensable et urgent de développer une éducation sexuelle sans tabou pour les jeunes burundais exposés à une hyper sexualisation de la société, à travers les chansons, les publicités, les films érotiques ou pornographiques. Et ce n’est pas que par la sensibilisation contre les grossesses non désirées, MST et IST que cette éducation va aboutir.
Quand on parle de sexe, ou de sexualité, tout le monde sursaute et devient plus attentif mais pas toujours pour les mêmes raisons. Cette notion de sexualité est tellement taboue et de plus en plus diabolisée que pour en parler, il faut utiliser des codes et des métaphores. Pourtant, que ce soit dans les conversations quotidiennes, les chansons burundaises (ne parlons pas même pas de ceux de la sous-région ou des stars américains adulées par la jeunesse), les danses, etc., partout, on y retrouve une trace de sexualisation des mots et des images. Mais qu’on en parle ou pas ou qu’on soit offusqué ou non, la sexualité et plus spécifiquement les envies sexuelles sont là et plus particulièrement chez les jeunes adolescents en découverte de leurs corps.
L’éducation sexuelle ne devrait pas se focaliser que sur les maladies ou infections sexuellement transmissibles ou les grossesses non-désirées car, selon la sexologue Maeva Bonjour, la sexualité d’une personne regroupe l’intimité, la sensualité, l’identité sexuelle, les sentiments, les valeurs.
La moralisation n’est pas toujours la solution …
Ainsi, si cette éducation est plus culpabilisante ou moralisatrice que positive et ouverte à la discussion, elle ne fera que bloquer les jeunes et les conséquences seront graves et de longue durée. Malheureusement, au Burundi (et même ailleurs), cette méthode d’éducation est la plus utilisée que ce soit dans les confessions religieuses ou les familles. Dans nos familles burundaises, les exemples sont légion : quand une scène érotique passe à la télé, on change de chaîne ou on éteint la télé. Quand un enfant ose poser des questions relatives aux rapports sexuels, si ces parents sont cools ou bien ils lui diront un joli mensonge ou alors ce sera une réponse interrogative agressive : « Pourquoi veux-tu le savoir ? Où as-tu entendu ça ? » Et du coup, l’adolescent n’aura que d’autre choix que d’aller à la pêche aux infos auprès de ses amis et de l’internet, avec tous les risques de tomber sur des informations tronquées ou erronées.
L’autre méthode de sensibilisation est basée sur les préventions des risques ou les menaces religieuses ou culturelles qui tôt ou tard finissent par échouer, car les hormones et les pulsions sexuelles seront plus fortes que toutes les théories apprises. Autant donc brosser tout le tableau aux concernés pour qu’ils aient leur propre regard critique sur la sexualité et prendre une décision raisonnable sans l’impression d’avoir l’épée de Damoclès suspendue à leur tête.
Lewis* vient d’une famille protestante très stricte. Que ce soit chez lui ou à l’église, les nombreuses questions qui lui passent par la tête autour de la sexualité ne trouve pas de réponses concrètes. « Chez nous, on parle de sexe toujours comme d’un péché de chair et d’une malédiction pour la famille au cas où on s’adonnerait à la débauche. Le discours tenu à l’église est le même que celui tenu par mon père », confie le jeune homme. Pour en savoir plus, il profite de ses camarades de classes qui lui font part de leurs connaissances et expériences sexuelles.
L’éducation sexuelle est partagée
Même si les parents sont indispensables dans l’éducation de leurs enfants, le cadre familial n’est pas toujours le lieu idéal pour aborder la sexualité, parce qu’il s’agit d’un sujet intime, où les enfants ne sont pas toujours à l’aise pour partager leurs pensées sur la sexualité avec leurs parents ou parce que la culture ou les croyances religieuses n’incitent pas à la liberté de parole.
Néanmoins, les parents devraient s’atteler à inculquer à leurs enfants la notion du respect de l’autre quel que soit le sexe mais aussi surtout du consentement mutuel en matière sexuel, afin de les sensibiliser à la question du viol, notamment.
Dans ce sens, l’école est le lieu privilégié pour aborder l’éducation sexuelle. Cette dernière devrait faire partie des programmes au même titre que d’autres cours en donnant des informations sur les organes génitales avec images à l’appui, des méthodes contraceptives traditionnelles et alternatives, pour mieux prévenir que punir, ou essayer de guérir.