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Jeunesse burundaise : le réveil a sonné !

La jeunesse vit actuellement une crise des valeurs sans précédent. Sa conscience d’appartenance subordonne la conscience nationale. L’adéquation formation-emploi est utopique. Le relationnel semble devenu le mot de passe pour décrocher un boulot. Nos parents/nos politiques ont fait leurs temps. Que les jeunes vivent et inventent les leurs !

Environ 65% de  la population active au Burundi est constituée de jeunes âgés de moins de 25 ans. Cette jeunesse constitue un potentiel constructif certain, et sur tous les plans. Nonobstant, ils sont partout présents mais pourtant si absents. Les jeunes sont largement ignorés par les politiques publiques. Le chômage les récupère. Les entrepreneurs de la violence les trouvent bon marché. « On les frappe au dos parce qu’ils sont inclinés », aimait dire Martin Luther King, l’icône américaine de la non-violence. Mahatma Gandhi l’exprimait bien aussi : « La violence est le refuge de l’incompétence ». 

Au Burundi où chaque éphémère période de paix semble enceinte d’une guerre, la jeunesse, elle, vit une crise des valeurs dans laquelle elle est à la fois actrice, complice et victime. Abbé Ntabona nous disait un jour que  « le sacré se politise et le politique se sacralise ». Selon un adage indien, les pouvoirs publics devraient s’intéresser aux herbes qui poussent au lieu des forêts qui brûlent. 

Ce passé devrait enfin passer 

Les hommes ressemblent beaucoup plus à leurs temps qu’à leurs pères, disait Marc Bloch historien français. Les crises qu’a connues le pays, dans lesquelles la jeunesse reste une figure centrale, sont le fait des Burundais. Et donc, gémir tout le temps « nous avons été manipulés » ne peut pas être l’éternelle excuse.

À quoi nous aide de vivre les opprobres dont ont été champions nos aînés ? Pourquoi remuent-ils toujours les mêmes bassesses d’ « ethnisme », de régionalisme qu’ils ont consommées à forte dose ? Pourquoi subir les mêmes peines qu’eux ? À qui profite le mal ? Qui des jeunes aujourd’hui sont capables d’adhérer ou d’élire un parti politique sur base d’un programme de société ? Ou de dissocier tel projet de la formation politique A à tel autre B ? Je parie que personne ! Nous sommes malheureusement emportés par des promesses de basse échelle. Nous ne savons pas vers où nager et nul vent ne nous est favorable.

À bas cette manipulation ! Soyons exigeants, c’est possible. Que la haine, la méchanceté ne gouvernent pas ! Nous avons d’autres chats à fouetter. Essayons désormais de penser avec nos cerveaux et non avec nos cœurs. Le passé doit nous être une leçon. N’en faisons surtout pas un miroir. 

Majorité « minorisée », réveillons-nous !

Les grandes crises permettent une prise de conscience, et de là naissent les leaders. On le regrette au Burundi. 2020 approche à grands pas. Des signes d’intolérance politique augurent un débordement pourtant évitable. Qu’on n’obéisse plus aux stimuli propres à provoquer des réflexes conditionnés sans que nous connaissions les tenants ou les aboutissants. Des esprits se réchauffent du jour au jour. Des enseignements partisans, « ethnicisants » sont ou seront en vogue bientôt. Que nous sachions faire la part des choses. Qu’on s’aligne derrière les leaders répondant le mieux à nos soucis. Ils s’en trouvent. Ne soyons pas une jeunesse abusée puis récupérée pour des actions « lucratives » dénuées de moralité. Bref, une « génération perdue ». 

Nous héritons une culture forte éclatée où les références volent en éclats et les tissus sociaux déchirés. Nous devons oser désormais « oser inventer l’avenir » comme le disait si bien Thomas Sankara, s’en prendre à nous-mêmes et combattre l’oisiveté et l’attirance des raccourcis (vouloir tout et tout de suite). Car, apprendre sans réfléchir est vain, l’inverse est dangereux. Rien ne nous sera servi sur un plateau d’or. L’avenir sera ce que nous aurons voulu qu’il soit. En pensant par procuration, nous jouerons toujours perdant. Scrutons les personnes ressources, des rocs sur quoi s’appuyer, des repères vivants. Chers jeunes, libérons notre imagination et inventons nos modèles. Ne gâchons pas notre jeunesse pour perdre la vieillesse. C’est une tâche difficile certes, mais une mission possible. Car, « si nous refusons de vivre ensemble comme des frères, nous mourons ensemble comme des idiots », interpellait Martin Luther King. Demain, c’est très tard.

 

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