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Regideso : autopsie d’une société au « bord du gouffre »

La Regideso enregistrerait une sous-consommation électrique. À titre illustratif, en 2017, sur la production annuelle estimée à 259 333 733 Kwh, seuls les 175 357 725,3  Kwh ont été consommés. Présentée comme ça, on irait croire que cette compagnie se porte à merveille et le taux d’électrification du Burundi enviable. Mais non. De l’aveu même du ministre de l’ Énergie et des Mines, elle vivrait au contraire ses mauvais jours. 

Province Bujumbura. Commune Mutimbuzi, zone Maramvya, colline Buhomba. Là s’érige un nouveau quartier. Une sorte de prolongement de la ville de Bujumbura. Depuis quelques années, les maisons y poussent comme des champignons. Et de haut standing pour la plupart. 

Un hic, toutefois. Cette ville naissante n’est pas alimentée en électricité, sauf, faut-il le mentionner, quelques ménages qui se sont « arrangés » par des initiatives individuelles. Nombreux sont ceux qui attendent malgré eux l’alimentation en électricité de leurs ménages. Et des demandes sont formulées, en vain. De quoi dépiter Abdoul, propriétaire d’un grande bâtisse dans laquelle il a déménagé il y a de cela trois ans : « Quand ma famille et moi avons démangé, je pensais que j’accéderai à l’électricité facilement vu que les poteaux électriques traversent notre quartier. Mais c’était de la naïveté. Trois ans viennent de s’écouler et les demandes formulées à l’endroit de la Regideso restent sans effet ! ». Un cas, loin d’être isolé, qui témoigne des dysfonctionnements de notre unique fournisseur d’eau et d’électricité.

C’est reconnu par le ministère de tutelle

Dans une réunion en assemblée générale tenue fin mars, Côme Manirakiza, Ministre de l’énergie et des mines n’a pas manqué de brosser un bilan largement négatif des activités de la Regideso. Sur le banc des accusés, un personnel pléthorique peu productif, inoccupé, gonflant par là la masse salariale de cette société.

De la corruption aussi à travers des passations des marchés publics. Ici, le ministre dénonce un approvisionnement en équipements des plus douteux, des fonctionnaires de la cellule de gestion des marchés publics commandant des équipements obsolètes avec un manque à gagner de plus de 13 milliards de Fbu.

Qui plus est, la Regideso accuse des impayés d’un montant faramineux. Le Directeur Général de la Regideso, Siméon Habonimana, parle de 63 milliards de Fbu. 

C’est aussi sans parler des agents rusés qui négocient avec les industriels pour contourner les compteurs électriques et  qui se font enregistrer dans la catégorie des ménages, des agents de recouvrement qui font des deals avec les clients pour la falsification de factures d’eau ou d’électricité pour in fine gagner une commission de 10 % sur la facture.

Des dysfonctionnements, apprend-on, qui pousseront le ministre à exiger une restructuration de cette société. 

Vers une réforme totale ?

Face à ces divers problèmes qui minent la Regideso, le président de l’Association Burundaise des Consommateurs (ABUCO), Pierre Nduwayo, rappelle que depuis 2012, son association n’a cessé d’exiger un audit général organisationnel et de gestion afin qu’il y ait une réforme totale de la Regideso, ô combien vitale pour le pays : « Maintenant que les autorités de tutelle dénoncent la façon de faire de cette société, il est temps qu’elles prennent les choses en main et procèdent à une refonte complète de la société ».

La mauvaise gestion, les lacunes dans le recouvrement des arriérés des institutions publiques, un personnel pléthorique, ajoute-t-il, sont entre autres des maux qui  gangrènent notre Regideso et qu’il faut vite venir à bout. Mais, estime-t-il, à l’état actuel, la Regideso n’est pas à mesure de procéder à des réformes. C’est aux pouvoirs publics de prendre les choses en main. 

Et en plus de la restructuration de cette société, conclut Pierre Nduwayo, la construction des barrages hydrauliques en cours peut aboutir à un léger mieux. Mais faut-il penser aussi à l’amélioration de l’offre énergétique. Et cela doit passer par la diversification des sources d’énergie, notamment l’investissement dans les énergies nouvelles et propres : énergie solaire, énergie éolienne…

 

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