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Casse-tête logistique à une semaine de la présidentielle

Alors que plus de 84 millions de Nigérians sont attendus aux urnes pour élire leurs nouveaux président et députés, les premiers couacs sont apparus ces dernières semaines, de nombreux Nigérians n’ayant pas pu obtenir leurs cartes d’électeurs (PVC).

Dans un des centres visité par l’AFP à Lagos, la capitale économique, des milliers de gens se bousculaient en attendant d’obtenir la précieuse carte qui leur permettra de voter le 16 février.

Tobiloba, 27 ans, est arrivé au gouvernorat local d’Eti-Osa à 05H30 du matin et a patienté durant des heures malgré la lourde pluie qui s’est abattue sur la ville.

"Le personnel (de la Commission électorale) n’est pas assez nombreux, et ils sont inefficaces et désorganisés", s’énervait-t-il en fin de matinée, accusant le gouvernement de vouloir "frauder".

"Ils sabotent nos efforts pour pouvoir voter et élire le candidat de notre choix, c’est injuste", expliquait-il.

Selon un agent de la Commission électorale nationale nigériane (INEC) s’exprimant sous couvert d’anonymat, la foule en colère avait même tenté plus tôt de renverser les grilles, obligeant l’INEC à faire intervenir l’armée pour sécuriser les lieux.

Des soldats étaient en effet déployés dans une cour boueuse, tandis que deux agents de la commission électorale juchés sur des plots appelaient quelques noms dans un mégaphone: "nous amenons d’autres PVC, gardez votre calme!".

Certains, comme Francis Ojah, 38 ans, en étaient à leur quatrième tentative: "Ils ne l’ont pas trouvé. Ils viennent de me dire de revenir après les élections, vous vous rendez compte!".

Au contraire, une dame est repartie avec deux cartes d’électeurs sans que son identité soit vérifiée, affirmant à l’AFP qu’il s’agissait de la sienne et celle de son mari.

De très nombreux messages postés sur les réseaux sociaux partageaient des expériences similaires dans le reste du pays.

Vendredi était censé être le dernier jour pour les récupérer, mais l’INEC a étendu le délai à lundi, incluant les samedi et dimanche de 9h à 18h.

"Nous avons été inondés d’appels de Nigérians nous demandant de revoir le procédé actuel de collecte", a déclaré son président, Mahmood Yakubu.

"Nous continuerons à prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’aucun électeur inscrit ne soit privé du droit de vote du fait de la non-collecte de sa PVC", a promis le superviseur du scrutin.

Insécurité

Organiser des élections dans le géant anglophone d’Afrique de l’Ouest, théâtre de plusieurs conflits et aux infrastructures souvent déplorables relèvent de la mission quasi-impossible.

Les autorités vont devoir acheminer par les airs ou par des routes -dont l’immense majorité ne sont pas goudronnées- le matériel électoral dans près de 120.000 bureaux de vote sur un territoire grand comme une fois et demi la France (920.000 kms2), où l’électricité est défaillante quand elle n’est pas inexistante.

L’insécurité demeure également une préoccupation majeure, car plusieurs régions sont actuellement en proie à des conflits armés ou au grand banditisme (braquages et enlèvements contre rançon).

C’est notamment le cas du nord-est du pays, ravagé depuis 10 ans par le groupe jihadiste Boko Haram, qui a intensifié ses dernières mois ses attaques, provoquant une grave crise humanitaire avec 1,8 millions de personnes déplacées.

Plusieurs observateurs, comme l’ambassade des Etats-Unis en janvier, ont émis la crainte d’attaques visant les centres de vote.

La commission électorale a désigné huit grands camps de déplacés – sur les dizaines que compte la région – dans l’Etat du Borno, le plus touché par les violences, comme centres de vote pour près de 400.000 personnes.

Mais dans les bastions de Boko Haram où le gouvernement n’a aucun contrôle, notamment près du lac Tchad, "des centaines de milliers de personnes ne pourront pas voter", estime un humanitaire basé à Maiduguri.

Les même difficultés pourraient se poser dans le centre où des affrontements entre éleveurs et agriculteurs pour l’accès à la terre ont fait des milliers de morts et des dizaines de milliers de déplacés depuis début 2018.

Dans les Etats de Benue et du Plateau notamment, beaucoup de familles ont perdu tous leurs documents d’Etat civil lorsque leurs villages ont été incendiés et ne pourront pas s’exprimer dans les urnes.

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