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Magistrats en grève en Tunisie, les tribunaux au ralenti

A view shows an empty courtroom during a strike by Tunisian judges in a protest against a purge of their ranks, in Tunis, Tunisia, June 6, 2022. REUTERS/Jihed Abidellaoui

En Tunisie, premier jour de grève pour les magistrats après le limogeage de 57 d’entre eux par le président Kaïs Saïed qui a parlé de corruption et d’atteinte au bon fonctionnement de la justice. Elle doit durer une semaine.

Avec notre correspondante à Tunis, Lilia Blaise

Au tribunal de première instance de Tunis, seul le travail administratif fonctionne, la plupart des salles d’audience sont vides et les magistrats grévistes se sont réunis dans un bureau pour exprimer leur colère, comme Hamadi Rahmani, un juge qui fait parti des 57 limogés par Kaïs Saïed : « Celui qui veut réformer la justice ne doit pas s’en prendre aux indépendants et ceux qui militent pour l’indépendance du secteur judiciaire. Au lieu de ça le président limoge mais il y a aussi des campagnes de harcèlement à l’égard de certains juges via des posts anonymes publiés sur les réseaux sociaux. »

En effet la délation a commencé sur les réseaux sociaux, une magistrate limogée pour outrage aux meurs s’est vue accusée d’adultère via des documents médicaux et personnels publiés à son insu ce week-end. Elle a dû se défendre publiquement. Le climat est humiliant pour le secteur judiciaire, selon Aïcha Belhassen, vice-présidente de l’Association des magistrats tunisiens.

« C’est une crise sans précédent en Tunisie et cette crise ne peut pas continuer comme ça parce que les magistrats sont solidaires et ils ont dit non à ces décisions de révocation sans aucun recours, sans aucune garantie. »

Aya Riahi est conseillère juridique pour l’ONG tunisienne I Watch, une association qui lutte contre la corruption. Elle demande de la transparence à la présidence tunisienne.

Les raisons derrière leur révocation ne sont pas claires […] On a demandé pour la énième fois de publier les dossiers des magistrats accusés de corruption, ils ont refusé […] Cette ambiguïté divise les Tunisiens […] Le manque de transparence créé cette polémique […] Ce qui est alarmant, c’est que la décision a été prise unilatéralement par le président. C’est pas un projet de réforme, c’est plutôt une destruction des pouvoirs en Tunisie

Aya Riahi

De son côté, le président Kaïs Saïed a convoqué la ministre de la Justice pour suspendre les salaires des juges grévistes. Une manifestation des magistrats et de la société civile est prévue mercredi 8 juin.

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