« Eaux troubles » : c’est le grand titre du quotidien Enquête au Sénégal. Le Sénégal, où « démarre, aujourd’hui lundi, le 9e Forum mondial de l’eau. Un événement qui place Dakar, du 21 au 26 mars, comme la capitale mondiale de l’eau, pour une rencontre dont le thème, ‘La sécurité de l’eau pour la paix et le développement’, permettra d’aborder les enjeux globaux pour l’homme et la nature, aujourd’hui et demain. »
Pourquoi ce titre « eaux troubles » ? Tout simplement parce qu’au Sénégal, explique Enquête, « l’abondance du précieux liquide contraste avec le manque de disponibilité d’une eau de qualité. » Quand on a la chance de disposer de réserves d’eau, encore faut-il en effet bien la préserver, notamment de la pollution, bien la traiter et bien la distribuer.
Qui plus est, les réserves d’eau du Sénégal ne sont pas inépuisables… Et « le niveau des prélèvements actuels devrait augmenter de 30 à 60% d’ici 2035, relève Enquête, renforçant le stress hydrique et mettant à l’épreuve la capacité de répondre à la demande d’une population en pleine urbanisation. Les phénomènes extrêmes liés à l’eau et sa pollution coûtent déjà au Sénégal plus de 10 % de son PIB chaque année. »
« L’eau est également vitale pour l’agriculture, pointe encore Enquête, qui représente 23 % du produit intérieur brut. Et puis c’est en Afrique également que la mauvaise qualité de l’eau est à l’origine de 70 à 80 % des maladies. »
Résultat, conclut le quotidien sénégalais : « l’Afrique devrait investir jusqu’à 20 milliards de dollars chaque année dans ce secteur de l’eau, et les pays du continent ne lui allouent aujourd’hui que 0,5 % de leur PIB. » De plus, « une plus forte participation citoyenne est également nécessaire à tous les niveaux. Le but ? Transformer notre façon d’utiliser l’eau, de la partager, de l’économiser, d’éviter son gaspillage et de la valoriser. »
Un meilleur accès à l’eau
L’Intelligent en Côte d’Ivoire défend également l’instauration d’une vraie politique de l’eau : « L’Afrique, si elle veut exploiter l’énorme potentiel de développement économique qui est le sien et vivre en paix, doit créer les conditions d’un meilleur accès à l’eau pour tous (populations et pays riverains des grands fleuves et des grands lacs). Or, le continent reste sous la menace du réchauffement climatique et de l’avancée des déserts dans la zone du Sahel et sa partie australe. Il convient de réaliser les infrastructures nécessaires et, à court terme, améliorer les réseaux existants et les solutions en matière de stockage. L’accès à l’eau est donc un défi permanent, les changements climatiques ne faisant qu’aggraver les différentes crises de l’eau : stress hydrique, pénurie, guerres de l’eau. »
L’Afrique a soif !
Il y a en effet urgence, pointe Jeune Afrique : « l’Afrique a soif », lance le site panafricain. « En Algérie, les autorités espèrent parvenir à éviter de revivre le terrible été 2021, marqué par des incendies de forêt. Au Maroc, où le cumul des précipitations sur ces cinq derniers mois est 64 % en deçà des moyennes habituelles, le gouvernement a annoncé une série de mesures d’urgence pour tenter de limiter les conséquences de cette baisse pour les agriculteurs. Le sud de Madagascar a connu sa pire sécheresse depuis quatre décennies. Dans la Corne de l’Afrique, certains pays n’ont pas connu de saison des pluies digne de ce nom depuis trois ans. En Éthiopie, au Kenya et en Somalie, les organisations humanitaires et les agences des Nations unies évaluent à 13 millions le nombre de personnes qui pourraient se retrouver dans une situation d’insécurité alimentaire grave. Paradoxalement, dans cette même zone, certaines régions se préparent au contraire à faire face aux suites de précipitations hors normes d’ici au mois de mai, dérèglement climatique oblige. »
Des sous et de la volonté !
D’où cette mise en garde, dans Le Point Afrique , de Patrice Fonlladosa, président du think tank (Re)sources : « à Dakar, bailleurs de fonds, décideurs publics et institutionnels, mais aussi acteurs privés et société civile seront face à un défi majeur : passer des discours aux actes, financés, organisés et mesurables. Ils devront faire la preuve de leur volonté commune de construire massivement les infrastructures nécessaires, condition sine qua non de la lutte contre le stress hydrique et les effets du changement climatique. Sans finances, point d’issue, mais, sans gouvernance, un sommet de plus pour des espoirs déçus. Gageons, conclut Patrice Fonlladosa, que tous ont conscience de l’enjeu, les yeux grands ouverts. »