Le 22 février 1857 naissait le militaire britannique Robert Baden-Powell, fondateur du mouvement international du scoutisme. La célébration prend une dimension toute particulière en Centrafrique, pays déchiré depuis des décennies par la guerre civile, mais où le mouvement ne s’est jamais éteint malgré les crises. Au contraire, pour des milliers de jeunes scouts, il représente une échappatoire à la violence, aux difficultés familiales et aux manquements du système éducatif dans un pays où seul un enfant sur deux termine l’école primaire, selon l’ONU.
De notre correspondant à Bangui,
Les uniformes et la discipline des scouts détonnent au milieu des maisons en tôle. Jerry Ngaossende ajuste minutieusement les foulards de ses cadets. « C’est la tenue qui nous protège, dit-il avec fierté. Si nous sommes dans notre tenue, même les belligérants nous voient et passent. En portant notre tenue, on ne peut jamais aller faire n’importe quoi parce qu’un scout est quelqu’un qui est toujours réglo. »
Sous le regard amusé des passants, il prend fièrement la tête d’une petite procession direction le stade de la capitale pour la répétition du grand défilé. Rejeté par sa famille à l’adolescence, il trouve refuge dans le scoutisme. Le mouvement l’aide à traverser les moments difficiles de sa vie et ceux que traverse son pays, comme lors de la guerre civile en 2013. « Les tueries, les braquages, les pillages, tout ça… En tant que scout, tout ça m’énerve. Je vois les jeunes qui se lèvent pour aller tuer. Ça me marque négativement. »
« Les scouts étaient présents »
Luther Wada, secrétaire général de l’association nationale des scouts, se souvient. « Pendant la crise, les scouts étaient très présents sur la scène. Il y avait eu des déplacés internes et les scouts étaient là pour prêter main forte, pour ravitailler de l’eau pour assister aux premiers secours. Ils étaient présents. »
Fred Crock, le chef de district, forme les plus jeunes en mémoire d’un camarade décédé au plus fort des combats. Tandis qu’il portait secours à ses voisins. « Il a entendu des cris à côté de lui. En tant que scout, il n’a pas supporté les cris, il a été là-bas pour soutenir les gens. Et il y a laissé sa vie. »
« C’est grâce au scoutisme que je suis ce que je suis »
De retour à la paroisse, l’ambiance est solennelle. Jerry épingle un petit ruban jaune sur la manche d’un jeune garçon au regard grave.
« J’aurais dû abandonner l’école en classe de cinquième et heureusement que mes chefs scouts étaient là », dit Jerry, reconnaissant. « Je suis maintenant étudiant en droit en deuxième année. Donc c’est grâce au scoutisme que je suis ce que je suis aujourd’hui. »
Jerry poursuit des études de droit. Il se rêve magistrat pour enfin, dit-il, mettre un terme à l’injustice.