« C’est ‘paradoxal’… Le mot échappe à un officier, comme un aveu d’étonnement. Au lendemain du camouflet infligé par le gouvernement malien à la France, en exigeant manu militari le départ de son ambassadeur, Barkhane poursuivait ses opérations sur le terrain comme si de rien n’était, constate Le Figaro. Dans la région d’Indelimane, de Ménaka ou d’Anderamboukane, plusieurs manœuvres sont actuellement en cours. »
Pour autant, face à la pression malienne, le dispositif militaire français et plus largement européen devrait évoluer. Hier, note Le Figaro, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a été très clair devant les députés : ‘le combat contre le terrorisme se poursuivra au Sahel, il se poursuivra avec l’accord des autres pays de la région. (…) Notre volonté est intacte et ce n’est pas un événement dû à l’irresponsabilité, je réitère mes mots, dû à l’illégitimité d’un gouvernement de coup d’État qui va nous faire enrayer notre lutte contre le terrorisme’. »
Le Niger nouveau point d’ancrage ?
Alors, s’interroge Le Monde, « le départ des quelque 2.500 soldats encore déployés au Mali dans le cadre de l’opération antiterroriste Barkhane est-il sur le point de se concrétiser ? ‘Tous les scénarios sont étudiés’, affirme-t-on à l’état-major des armées, tout en précisant que, dans l’attente d’une décision, les opérations continueront au Mali, car la France ne peut ‘pas laisser l’initiative aux groupes terroristes’. (…) Si le coup d’État survenu le 24 janvier au Burkina Faso voisin est venu apporter à la France de nouvelles incertitudes, le Niger, pointe Le Monde, est aujourd’hui envisagé comme le futur pivot de l’intervention antiterroriste dans la région. »
Une mutation qui prendra du temps…
En tout cas, « si l’hypothèse d’un retrait français est sur la table, elle pose une série de difficultés techniques et politiques, relève pour sa part Libération. D’abord le délai : la France ne pourrait pas plier bagage du jour au lendemain. La manœuvre logistique est assez complexe, elle ne se ferait pas en quelques semaines, mais en quelques mois voire en douze mois. Elle se déroulerait de surcroît dans un contexte de rejet populaire de la présence militaire française, qui s’est récemment manifesté sous la forme de blocages de convois de ravitaillement au Burkina Faso et au Niger. Pendant ces manœuvres, les forces sont plus vulnérables, car elles cessent de harceler et gêner les groupes ennemis. »
Par ailleurs, précise encore Libération, « Barkhane était déjà en cours de mutation, avec des répercussions sur l’ensemble de la région. Emmanuel Macron avait annoncé en juin dernier la fin prochaine de l’opération au profit d’une autre, moins française, plus européenne. Le désengagement est terminé dans le grand nord. Barkhane ne se limite pas au Mali et se renforçait déjà autour, notamment à Niamey, au Niger, où sont concentrés les moyens aériens. Les forces spéciales sont quant à elles stationnées au Burkina Faso. Un départ du Mali ne signifie donc pas mécaniquement un retrait de l’ensemble du Sahel. »
Coté malien, à présent, « le temps va rapidement jouer en défaveur des putschistes, affirme La Croix, même s’ils sont acceptés par une partie de la société civile et de l’opposition politique. L’opprobre international, la poursuite probable des violences dans ce pays composite et les sanctions économiques décidées par la CEDEAO pourraient vite saper leur autorité. Et les amener à négocier. »
Répercussions sur la campagne présidentielle…
En attendant, le dossier malien s’est invité dans la campagne présidentielle française… C’est ce que pointe L’Opinion. « L’expulsion de l’ambassadeur français ne manque pas de faire réagir les candidats, de l’extrême-droite à l’extrême-gauche de l’échiquier politique. « Pour Eric Zemmour, ‘toute la politique africaine de la France est à repenser’. (…) Un sentiment partagé par Marine Le Pen qui appelle à couper l’aide au développement et les transferts de la diaspora. (…) Valérie Pécresse déplore le manque d’anticipation de l’exécutif. (…) A gauche, Jean-Luc Mélenchon a demandé au gouvernement de ‘vider l’abcès avec le pouvoir malien actuel’ et d’engager un débat parlementaire. Et pour l’écologiste Yannick Jadot, la France doit rester présente au Sahel, au Niger et au Burkina en particulier. Il faut une réunion urgente de la Minusma (la force des Nations-Unies au Mali). »