À Madagascar, le début de la campagne d’exportation de vanille suscite la controverse. Alors que la société civile demande au gouvernement l’abandon du prix plancher de 250 dollars le kilo à l’export, la liste des agréments qui autorisent les entrepreneurs à exporter la vanille laisse un goût amer à de nombreux entrepreneurs de la filière. Sur 300 demandes, seuls 66 opérateurs sont finalement autorisés à exporter de la vanille pour cette campagne. Soit près de moitié moins que l’année dernière.
Avec notre correspondante à Antananarivo, Laetitia Bezain
Pour les organisations de la société civile de la Sava et d’Analanjirofo, les régions où se trouvent le plus gros de la production de vanille, la fixation du prix à 250 dollars le kilo à l’export est « un frein à l’expansion du marché » et ne profite qu’à « quelques opérateurs privilégiés qui négocient les prix auprès des paysans au plus bas ». Si l’État a fixé le kilo de vanille verte à 75 000 ariary (19 dollars), dans les faits, les prix pratiqués sont très inférieurs et descendent parfois à 20 000 ariary (5 dollars) le kilo, dénoncent ces organisations, qui déplorent « des pertes considérables pour les paysans et une dégradation de leurs conditions de vie ». Une situation qui fait aussi craindre des tensions au niveau des communautés, expliquent-elles.
Plusieurs opérateurs du secteur estiment, par ailleurs, que 250 dollars le kilo est un prix trop élevé qui détournerait les potentiels clients de la vanille malgache. Contacté, le ministre de l’Industrie, du Commerce et de la Consommation, Edgard Razafindravahy, nommé mi-août à ce poste, indique que ce tarif a été fixé avec le Conseil National de la Vanille qui regroupe les acteurs de la filière : planteurs, préparateurs-conditionneurs et exportateurs. Une décision qui « assure un prix qui ne soit pas trop bas et qui maintient la vanille malgache à sa juste valeur sur le marché international », précise t-il. Concernant le prix de la vanille verte le ministre fait savoir que « des procédures et des moyens de contrôle sont en cours d’étude au ministère pour assurer le respect du prix de la vanille verte ».
Des stocks mais pas d’agrément pour exporter
La société civile conteste aussi la procédure d’octroi des agréments qui autorisent les entrepreneurs de la filière à exporter. Selon elle, « très peu d’opérateurs privilégiés peuvent en bénéficier ». La liste sortie ce lundi 20 septembre par le ministère du Commerce a fait l’effet d’une douche froide pour certains. « J’ai fourni tous les documents nécessaires. Je ne comprends pas pourquoi je ne suis pas dans la liste », se désole cet entrepreneur qui exporte de la vanille depuis plusieurs années. « Le ministère dit qu’il veut assainir la filière mais pour nous ça ressemble plus à une éviction de certains opérateurs. Nous sommes une vingtaine dans ce cas. On nous a demandé d’acheter de la vanille aux paysans pour les soutenir et maintenant on a des stocks mais pas l’agrément pour exporter, ça n’a pas de sens », poursuit-il.
Le ministre du Commerce affirme que les opérateurs autorisés à exporter sont ceux qui ont respecté les critères requis pour bénéficier d’un agrément, notamment être en règle vis-à-vis du Fisc et du Service de la Finance Extérieure et avoir rapatrié les devises de la campagne d’exportation précédente. « Si la société n’a pas eu d’exportation en 2020, ou si la société ne dispose pas de stock disponible, pas de délivrance d’agrément, ceci pour éviter une spéculation d’agréments (…) À ce jour, les 66 sociétés ont respecté ces critères, le reste non, ou est en train de s’y conformer », précise Edgard Razafindravahy.