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À la Une: le coup d’État en Guinée

Moins de 24 heures après le coup de force perpétré par le colonel Mamady Doumbouya et ses hommes, la presse guinéenne, à l’instar des sites Aminata ou Guinée 7, se contente dans sa grande majorité de publier les différents communiqués du nouveau pouvoir militaire. Les annonces s’enchaînent : justification du coup d’État, appels au calme, à la concertation nationale, mais aussi instauration d’un couvre-feu à 20h, convocation des membres du gouvernement sortant et nomination de militaires à la tête des régions et des préfectures.

Entêtement

Comment en est-on arrivé là ? s’interroge Ledjely. C’est « l’aboutissement d’une crise que le pays vit depuis pratiquement deux ans et à laquelle le président déchu n’est pas étranger. […] Il est en effet admis que le débat né de la volonté du président Alpha Condé de s’octroyer un troisième mandat a placé la Guinée sur des charbons ardents depuis le début de l’année 2019. Et il s’est accroché à cette idée avec une telle détermination qu’il en était devenu l’otage. Inaccessible à tous les appels à la raison, il s’était évertué à anéantir tous ceux qui se dressaient sur son chemin, poursuit le site guinéen. Ce faisant, il aura balisé, sans le vouloir, la voie pour ceux qui viennent de le renverser. Car aujourd’hui, c’est de la mésentente qu’il aura instaurée dont se prévalent les nouveaux maîtres du pays. »

Recul

« C’est un énorme recul, soupire encore Ledjely, pour une Guinée qui, le 2 octobre prochain, soufflera sa 63e bougie. En 63 ans, on aurait pu faire mieux. On aurait dû faire mieux. Alpha Condé, en particulier, qui a longtemps incarné l’alternative à la dictature et à l’autoritarisme en Guinée, aurait dû s’éviter les images qui ont inondé les réseaux sociaux ce dimanche. Pour cela, il aurait fallu partir quand il le fallait. Résister au mandat de trop ! »

Qui plus est, pointe encore Ledjely, « cette manie de la soldatesque à faire irruption dans le champ politique et ces images de nos dirigeants que l’on montre à la face du monde sous leurs plus mauvais jour, voilà qui fige le continent africain. Ces images sombres, incarnées hier par Ibrahim Boubacar Keïta et aujourd’hui par Alpha Condé, ne font pas honneur à l’Afrique. »

Les Africains veulent une bonne gouvernance !

D’autres commentaires également dans la presse de la sous-région. « Ce coup d’État ne prouve qu’une chose, affirme WalfQuotidien à Dakar : les questions de bonne gouvernance se trouvent de plus en plus au centre de tout pouvoir en Afrique. En effet, avec les nombreuses aspirations de ces millions de jeunes, scolarisés, qui rêvent d’un mieux-vivre et qui sont en contact direct avec la réalité d’un monde devenu village planétaire, il n’est plus possible de voir des dirigeants se permettre tout et ne se priver de rien. La réalité est qu’aujourd’hui les Africains n’acceptent plus une certaine gouvernance […] menée par des élites médiocres dans leurs réalisations quotidiennes et qui promettent toujours des lendemains meilleurs. »

Pour Le Pays au Burkina Faso, « Alpha Condé quitte le pouvoir comme il y était arrivé, à la surprise générale, et on craint déjà la suite des événements dans ce pays chroniquement en crise. Car, si c’est un dictateur de moins pour la Guinée, cela pourrait être aussi un problème de plus si les nouveaux maîtres ne font pas preuve de discernement et ne remettent pas le pouvoir à un président démocratiquement élu dans un délai raisonnable. »

Que va faire la CEDEAO ?

Enfin, « comment va réagir la CEDEAO ? », s’interroge pour sa part L’Observateur Paalga, toujours au Burkina Faso. « S’il faut s’attendre à des condamnations de sa part, on se demande si elle se donnera véritablement les moyens de faire lâcher prise aux auteurs du putsch. En effet, la question mérite d’être posée quand on sait que cette organisation sous-régionale a été accommodante avec les putschistes maliens. Il en a été de même de l’Union africaine qui, au-delà du Mali, a fermé les yeux, comme la France et la communauté internationale, sur le coup de force perpétré au Tchad. Créant ainsi des précédents dangereux dans une Afrique où, pour un oui ou pour un non, la Grande Muette se fait souvent entendre. »

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