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Restitution des œuvres d’art africaines: les nouvelles règles de la Belgique

La Belgique fait un grand pas en avant dans la restitution des objets spoliés durant la période coloniale. Les autorités viennent de présenter un nouveau cadre juridique. Les Belges ne veulent plus des objets qui ont été acquis de manière violente. Conséquence : la République démocratique du Congo pourrait se voir ainsi rétrocéder des milliers d’œuvres.

De notre correspondant à Bruxelles,

Désormais, les œuvres sont classées en trois catégories. Première catégorie : elles ont été acquises de manière légitime, et dans ce cas, elles peuvent rester en Belgique. Imaginons une œuvre réalisée récemment par un artiste congolais et vendu directement au musée. Là, pas de problème.

Seconde catégorie : l’objet a été obtenu de manière violente, lors d’un pillage par exemple. Désormais, la Belgique rend ces œuvres directement disponibles à la RDC.

« Dès qu’on a déterminé que cela a été acquis de manière illégitime, la propriété de cette pièce revient tout de suite au gouvernement congolais, souligne Guido Gryseels, directeur général du Musée royal de l’Afrique centrale, la plus vaste collection d’art africain en Europe. Ensuite, c’est au gouvernement congolais de décider si la pièce reste ici ou si elle doit être rendue au Congo, et quand elle reste ici, sous quelles conditions. Mais c’est au Congo de déterminer cela. On ne veut pas imposer des critères ou des conditions pour rendre une pièce. C’est entièrement au Congo de décider cela. »

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Travail immense pour déterminer l’acquisition des objets

Troisième et dernière catégorie : les objets dont on ne situe pas avec précision l’origine. Dans ce cas, les pièces passent du domaine public vers le domaine privé de l’État, afin de les rendre aliénables. Selon le résultat de l’enquête, ils peuvent devenir restituables.

Mener des recherches autour de l’histoire des objets, pour connaître comment ils ont été acquis, voilà une tâche titanesque. Il faut avoir en tête qu’au Musée royal de l’Afrique centrale, qu’on appelle communément Musée de Tervuren, environ 85 000 objets proviennent de l’ancien Congo belge. C’est donc un travail immense qui attend les experts, pour déterminer leur acquisition.

« Je travaille sur des objets bien précis, notamment les masques Yaka, nous explique Placide Mumbembele, professeur à l’université de Kinshasa et qui se trouve justement en résidence au Musée royal de l’Afrique centrale pour étudier la provenance des objets présentés. Pour ce faire, je consulte d’abord le registre d’entrée de toutes les collections du Musée de Tervuren, donc depuis toute la période coloniale. Une fois que je tombe sur le masque, je vérifie qui l’a collecté et en quelle année… Une fois que j’ai le nom de la personne, je peux me rendre dans les archives pour comprendre son parcours : comment il a vécu au Congo, le contexte dans lequel il avait obtenu ce masque. Est-ce par la violence ? Par un achat ? Est-ce un cadeau qui a été fait ? C’est un travail qui n’est pas aussi facile. »

Ce travail de restitution va donc prendre plusieurs années. Mais les premiers objets pourraient revenir en RDC dès l’année prochaine, à l’occasion de l’anniversaire de l’indépendance.

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