Les élections législatives anticipées, samedi, ont été marquées par une très forte abstention. « Enjeu principal, le taux de participation national n’a atteint que 30,2%, pointe Jeune Afrique, soit le score le plus faible depuis au moins 20 ans pour des législatives. À titre de comparaison, il se situait à 35,7% lors des dernières législatives de 2017 (et 42,9% en 2012). La participation est même en recul par rapport à la présidentielle de 2019, qui avait vu Abdelmadjid Tebboune élu avec seulement 40% des voix, soit une abstention record pour une telle élection »
Pour le quotidien gouvernemental El Moudjahid, tout va bien. « 30,2%, c’est le taux moyen de participation au scrutin des législatives anticipées, ce rendez-vous conforte la confiance rétablie entre le citoyen et l’organisation des élections suivant des règles de transparence et d’intégrité, une échéance qui donnera naissance à une APN, une assemblée populaire nationale, élue librement par le peuple. »
Élus par une minorité
Le quotidien Liberté n’a pas tout à fait la même analyse. Le président Tebboune a beau affirmer que le taux de participation ne l’intéresse pas, « la prochaine Assemblée nationale va souffrir de la faiblesse de sa légitimité, estime le quotidien algérien. Un handicap qui va offrir une occasion de plus à l’Exécutif pour « légiférer » à sa guise. Comme d’habitude. Le nouvel édifice institutionnel voulu est « érigé ». Le législateur avait tout prévu. Même le taux de participation sans impact sur l’issue de l’élection. Sauf au plan symbolique pour les députés qui devraient se rappeler qu’ils sont élus par une minorité. »
Les islamistes en passe de rafler la mise ?
« Et nous voilà à la croisée des chemins ! », s’exclame Le Matin d’Algérie. Le Matin d’Algérie qui s’interroge : « comment le pouvoir va-t-il affronter l’Après 12 juin ? Comment Tebboune va-t-il gérer la colère de la rue, lui, qui depuis son investiture au Palais d’El-Mouradia ne s’est jamais rendu dans une dechra [un village] ou même une wilaya [une préfecture] ? Et si les islamistes de Makri raflent la mise de cette élection, largement boudée par les Algériens ? Des questions de ce genre, on se les pose par milliers dans l’autre Algérie, celle des marginalisés, des pauvres et des laissés-pour-compte : l’Algérie de la jeunesse pour simplifier. Comment ne pas y penser, poursuit Le Matin d’Algérie, quand le premier magistrat d’un pays, pourtour de l’Afrique et de la Méditerranée, se fout royalement du taux de participation à une élection importante comme les législatives ? »
Justement, pointe le site TSA, Tout sur l’Algérie, « le parti islamiste MSP, le Mouvement de la société pour la paix, a revendiqué hier la victoire en Algérie et à l’étranger. Le MSP qui a demandé au président Tebboune de « protéger la volonté populaire qui s’est exprimée sur le terrain, et ce conformément à ses engagements ». Une demande justifiée par le MSP qui fait état de « tentatives » de fraude afin de « modifier les résultats de l’élection », ce qui pourrait avoir, selon lui, de « mauvaises conséquences » sur le pays. »
France 24 persona non grata
Enfin, hier, relève Le Monde Afrique, « les autorités algériennes ont décidé de retirer à nos confrères de la chaîne d’informations France 24 leur accréditation, en raison, disent-elles, de leur « hostilité manifeste et répétée ». Ce retrait est aussi motivé par « le non-respect des règles de la déontologie professionnelle, la désinformation et la manipulation ainsi qu’une agressivité avérée à l’égard de l’Algérie », a affirmé Ammar Belhimer, porte-parole du gouvernement. « Notre couverture de l’actualité algérienne se fait dans la transparence, l’indépendance et l’honnêteté », a pour sa part dit France 24. Le ministère français des affaires étrangères s’est refusé à tout commentaire. (…) Depuis des années, rappelle Le Monde Afrique, les médias étrangers travaillant en Algérie sont soumis à une procédure d’accréditation bureaucratique, opaque et aléatoire. Le directeur de l’Agence France-Presse pour l’Algérie, nommé en octobre 2019, n’a jamais obtenu d’accréditation des autorités. Aucun motif n’a été fourni à ce sujet. Et les conditions de travail sont difficiles pour les journalistes algériens, sur fond de répression du Hirak par les autorités. »