Le conflit continue au Tigré, province du nord de l’Éthiopie en proie aux violences depuis novembre. Face à l’ancien pouvoir tigréen du TPLF, les forces fédérales sont épaulées par l’armée érythréenne, mais également les milices amharas. Ce groupe ethnique a pris le contrôle d’une partie du territoire, notamment l’ouest et la pointe sud du Tigré. Des régions revendiquées depuis des décennies par les deux communautés. Reportage au Sud, à Alamata, une localité désormais sous contrôle amhara.
Avec notre envoyé spécial de retour d’Alamata, Sébastien Németh
Dans les rues d’Alamata, des barrages sont désormais installés en divers endroits de la ville. Ils sont tenus par les forces amharas qui revendiquent la pointe sud du Tigré.
Boytum Haile est enseignant et cette situation le désole : « Ça me rend triste de voir le Tigré amputé. J’ai l’impression d’avoir perdu mon identité. Je ne sais plus qui je suis. Et si j’ai un conflit avec un Amhara, on ne me donnera jamais raison, uniquement parce que je suis Tigréen. »
Les habitants affirment que les fonctionnaires tigréens ont été remplacés par des Amharas. Elias avoue avoir même dû faire changer ses papiers d’identité : « Lorsqu’on est contrôlés avec une carte d’identité tigréenne, les autorités nous demandent pourquoi on ne prend pas des papiers Amharas. À chaque fois, il y avait des tracasseries. Donc comme je suis fonctionnaire, je n’ai pas eu le choix, pour éviter les problèmes avec les forces Amharas j’ai dû faire modifier ma carte. »
Peur d’arrivées massives
Dans les hauteurs de la ville, un nouveau panneau indique désormais où commence la zone Amhara. Saleh Kube vit dans une maison juste en face. Il a du mal à accepter la situation : « Ça a toujours été et ça sera toujours un territoire tigréen. Si les Amharas viennent, nous nous battrons. Nous n’avons pas grand-chose, mais nous défendrons notre terre. »
Les habitants disent avoir peur d’une arrivée massive d’Amharas pour les chasser de la région. Dans l’ouest du Tigré, des milliers de gens ont déjà fui leurs maisons pour se réfugier dans des camps de déplacés du centre de la province.