Depuis début novembre le conflit continue dans le Nord de l’Éthiopie. La province du Tigré est en proie aux violences et même si la plupart de la région est contrôlée par les troupes fédérales éthiopiennes, épaulées par l’armée érythréenne, les forces tigréennes continuent la lutte. Résultat, l’économie du Tigré est en berne, les habitants subissent destructions, pénurie, inflation. A Mekelle, la capitale, une insécurité grandissante inquiète la population. Reportage dans un marché de la ville.
Avec notre envoyé spécial au Tigré, Sébastien Németh
Dans sa boutique, Shushay Gebrehannes sert ses clients en regardant régulièrement sa montre. Dans quelques minutes il devra fermer, pour diminuer les risques de braquage. « Un soir, des hommes m’ont pris la recette. Depuis, je ferme plus tôt, alors qu’avant j’étais ouvert jusqu’à 21h. Je ne propose que les produits qui se vendent le mieux. Les autres sont stockés chez moi. Mais je reste ouvert car il faut survivre et payer le loyer. »
La guerre a ébranlé l’économie du Tigré et appauvri la population. Pour survivre beaucoup seraient donc tombés dans la criminalité. Malgré une conjoncture catastrophique, Ezzedine Abdallah ne peut s’empêcher d’être ironique. « Aujourd’hui, voleur c’est le meilleur emploi que vous puissiez avoir à Mekelle. Car vous prenez ce que vous voulez. Et nous on ne sait même plus où mettre notre recette du jour pour qu’elle soit en sécurité. »
Résultat, l’insécurité a entraîné la création d’un nouvel emploi : celui de gardien. Hilal a été embauché en mars. Assis avec un long bâton à la main, il scrute les boutiques alentours. « La journée, les voleurs utilisent surtout des couteaux et des bâtons. Le soir, ils attaquent à l’arme à feu. Dans ce cas, on appelle la police fédérale. Moi je n’ai qu’un bâton et deux collègues. Je n’ai jamais vu un tel niveau d’insécurité. »
Beaucoup d’observateurs voient la situation sécuritaire au Tigré continuer à se dégrader. Une tendance qui devrait indirectement nourrir un peu plus l’insécurité ambiante.
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