Comment respecter les objectifs climatiques fixés par l’Accord de Paris de 2015, si les minerais nécessaires à la transition énergétique ne sont pas disponibles en quantité suffisante ? C’est un vrai casse-tête et c’est pour cela que l’Agence internationale de l’énergie tire la sonnette d’alarme.
Pour devenir un bon élève décarboné, il faut déjà en avoir envie, mais aussi en avoir les moyens. Si ce n’est pas possible faute de matières premières, les ambitions climatiques internationales risquent d’être très vite revues à la baisse. C’est sur ce thème que l’Agence internationale de l’énergie (AIE) interpelle aujourd’hui les États. Il est urgent, dit l’organisation, qu’ils se concertent s’ils veulent demain garantir leur approvisionnement en minerais, en particulier ceux qui sont nécessaires à la construction de voitures électriques, d’usines photovoltaïques et d’éoliennes pour ne citer que ces vecteurs d’énergie propre.
Les besoins varient pour chaque technologie. Pour être performantes, les batteries demandent du lithium, du nickel, du cobalt, du manganèse ou encore du graphite. Les terres rares, un groupe de 17 métaux, elles sont nécessaires à la construction des aimants des turbines des éoliennes notamment. Quant au cuivre, on en besoin dès qu’on parle d’électricité. L’AIE résume avec ces chiffres : une éolienne onshore a besoin de neuf fois plus de minerais qu’une centrale à gaz de taille équivalente, un véhicule électrique six fois plus qu’un modèle à essence.
La production minière ne pourra pas répondre à la demande en 2030
La demande est déjà très forte et devrait exploser d’ici à dix ans. Le décalage avec l’offre risque lui de se creuser de plus en plus pour certains minerais. Par exemple, explique l’AIE, « dans un scénario qui se conformerait aux objectifs climatiques fixés par l’Accord de Paris les réserves existantes et celles des projets miniers en cours, pourraient ne répondre qu’à la moitié des besoins estimés en cobalt et lithium d’ici à 2030 ».
Les questionnements sur la disponibilité de la matière sont liés à sa répartition inégale. Les trois quarts de l’offre des minerais nécessaires à la transition énergétique sont concentrés dans une poignée de pays, contrairement au gaz ou au pétrole mieux distribués sur la planète. À titre d’exemple, en 2019 la RDC assurait 70 % de la production minière de cobalt, la Chine, 60 % de celle des terres rares.
La transition énergétique pourrait être plus longue et plus coûteuse que prévu
Les interrogations sont justifiées aussi au vu de la baisse des investissements dans certains secteurs miniers, et les temps de latence sont tels entre la prospection et la mise en production – entre 10 et 20 ans souvent –, que le retard pris sera difficile à rattraper. Ne pas investir ou mal choisir sa cible, c’est courir le risque d’une transition plus longue et plus coûteuse, rappelle l’Agence internationale de l’Énergie. Un exemple encore, le prix des batteries augmenterait de 6 % si celui du lithium ou du nickel doublait.
Si les États ne clarifient pas leurs ambitions énergétiques, les futurs investissements miniers pourraient ne pas être adaptés, prévient l’AIE. Le recours au recyclage et à la recherche technologique pour trouver des métaux de substitution sont des pistes, mais ne pourront pas être les seules, préviennent les experts.