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Au Sahel et en Afrique de l’Ouest: renforcer les États et protéger les civils

Le sommet du G5 Sahel, les 15 et 16 février, est annoncé comme un nouveau rendez-vous important pour la lutte contre le terrorisme au Sahel. Mais le risque de contagion terroriste aux pays côtiers d’Afrique de l’Ouest a été récemment souligné par le plus haut responsable de la DGSE, les renseignements extérieurs français. Gilles Yabi a publié chez nos confrères de Jeune Afrique une tribune dans laquelle il appelle à « résister à la distraction, à la dispersion et à la fragmentation ».

Il s’agit d’abord de rappeler que le projet d’expansion des groupes djihadistes vers le sud n’était pas nouveau. Il y a eu une attaque en bord de mer à Grand-Bassam en mars 2016, au sud de la Côte d’Ivoire, une autre plus récemment en juin 2020 à Kafolo au nord de ce même pays, et un enlèvement au nord du Bénin, près de la frontière avec le Burkina Faso en mai 2019.

Depuis les interventions militaires française, africaine et onusienne en 2013 sont concentrées sur le nord du Mali, on pouvait comprendre en fait que la survie des groupes armés ne pouvait passer que par la dispersion de leurs éléments partout où les conditions locales s’y prêtent. Le centre du Mali, c’était déjà le sud du nord du Mali. La descente vers le sud est de fait amorcée depuis des années, avant même qu’elle ne fût définie comme objectif par les chefs d’Aqmi.

Résister à la distraction, c’est se concentrer sur la poursuite résolue et méthodique des efforts de construction de la capacité des États des pays du Sahel et de tous leurs voisins, à penser, à planifier, à organiser et à agir, avec un minimum d’autonomie, pour contenir toutes les sources et formes d’insécurité, qui ne résument pas à la violence terroriste.

Et les États, qu’il s’agisse de la composante militaire ou des administrations civiles, ce sont des hommes et des femmes qui les animent, du niveau de la conception des stratégies et des plans d’action à celui de la mise en œuvre. C’est en décortiquant les tares les plus graves, les dysfonctionnements les plus évidents dans le fonctionnement des États qu’on pourra donner du contenu à la rengaine sur le besoin d’un relais politique et économique de l’action militaire au Sahel.

Il faut aussi résister à la fragmentation, laquelle ?

La fragmentation du continent, c’est celle qui semble se poursuivre en prenant la forme depuis quelques années d’un détachement géopolitique du Sahel de son voisinage immédiat, notamment les pays côtiers dont les régions septentrionales partagent les mêmes caractéristiques économiques, sociales, écologiques, culturelles que les pays sahéliens.

C’est en partie dans l’intensification de la coopération, des liens, de la solidarité entre les pays enclavés du Sahel et leurs voisins du sud que se trouve la réponse aux défis du Sahel. Les problèmes du Sahel sont ceux de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique bien avant d’être ceux de la France et de l’Europe. Les opportunités aussi d’ailleurs, parce que le Sahel dispose aussi de ressources importantes à valoriser.

Gilles Yabi rappelle aussi aux décideurs politiques du G5 Sahel et à leurs partenaires la primauté qui doit être accordée à la protection des civils.

Absolument. J’évoquais il y a un instant l’impératif de la construction et du renforcement des États. Mais il s’agit aussi de les transformer en mettant en avant la bienveillance de toutes les composantes des États à l’égard des populations, en commençant par les forces armées qui se sont malheureusement distinguées à maintes reprises par des exactions graves. Il faut protéger les civils à tout prix et cela passe par la fin de l’impunité. Aucune attaque commise contre la population civile ne doit rester impunie, quelles que soient les auteurs de cette attaque. C’est un des messages clés de la coalition citoyenne pour le Sahel, qui rassemble plus d’une trentaine d’organisations de la société civile des pays de la région et d’ONG internationales.

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