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Soudan: l’impossible retour des déplacés du Darfour

Un nouveau gouvernement a été nommé lundi et sa tâche est immense. Il inclut notamment des membres des anciens groupes rebelles du Darfour, suite à la paix signée en octobre. Pour autant malgré l’accord, le Darfour reste instable. Des violences ont éclaté ces dernières semaines dans plusieurs zones de la province. Pour les déplacés de la guerre, vu le contexte, pas question de rentrer chez eux malgré la paix. Reportage dans le camp d’Abu Shouk, où vivent près de 50 000 déplacés.

Avec notre envoyé spécial à El Fasher, Sébastien Németh

Awatif Mahamat colmate sa clôture avec de la paille en prévision des prochaines pluies. Cette mère de 5 enfants est arrivée à Abu Shouk à l’âge de 14 ans, après l’attaque de son village de Kurma. Pour elle, pas question de rentrer pour l’instant.

« Dans l’accord, rien n’est indiqué pour nous. S’ils prévoient de construire des écoles, des hôpitaux. On ne sait pas. En plus, je n’ai aucune garantie pour ma sécurité. Je pourrais y aller et me faire chasser à nouveau. J’ai peur que les mêmes personnes nous attaquent encore. A l’époque, ils avaient des armes et ils ont chargé notre village sur des chevaux. Ils ont tout pillé, brûlé les maisons et violé des femmes. Une chose comme ça, ça reste dans votre mémoire pour toujours. Vous pouvez oublier une belle chose. Mais pas quelque chose d’aussi mauvais et brutal. »

L’inquiétude est d’autant plus forte que les casques bleus de la mission onusienne Minuad sont en train de partir. Abdurahman Abdallah, 50 ans, refuse tout retour, alors que le traumatisme de la guerre est toujours là.

« C’était un vendredi matin. Les miliciens sont arrivés sur des chameaux et des chevaux. Ils ont battu et violé les femmes. Je ne pourrai jamais oublier le moment où ils ont exécuté 42 hommes devant nous. Ce genre de violences continue aujourd’hui. Donc on ne peut pas tourner la page. Je préfère rester ici pour une bonne raison. Car qui garantira notre sécurité si nous rentrons ? Même avec l’accord de paix, c’est trop tôt. La zone n’est pas sûre. Je pourrais me faire attaquer, voler, ou tuer. Ce que fait le gouvernement n’est pas suffisant et je ne crois pas que les militaires pourront nous protéger. »

Les casques bleus devaient céder la place à une force gouvernementale de 12 000 hommes, mais le contingent n’est pas encore formé.

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