Le 34e sommet de l’Union africaine s’ouvre aujourd’hui, virtuellement pour cause de pandémie de Covid-19. Et c’est justement la gestion de la crise sanitaire qui prendra toute la place ce week-end. Les 55 chefs d’État discuteront des conséquences économiques de la pandémie ainsi que des stratégies de vaccination à venir.
Avec notre correspondant à Addis-Abeba, Noé Hochet-Bodin
Comme un symbole, c’est le président sud-africain Cyril Ramaphosa qui inaugurera ce sommet en tant président en exercice de l’Union africaine. Un symbole, car l’Afrique du Sud est le pays le plus touché du continent par le coronavirus. Et parce que Cyril Ramaphosa a été le fer de lance du continent pour exprimer sa frustration face à ce qu’il qualifie de « nationalisme » des pays riches dans leurs stratégies d’acquisition des vaccins.
Les vaccins, il en sera question tout au long du week-end. La majorité des États membres attendent encore la livraison des premières doses… qui seront accessibles grâce au Covax, le mécanisme onusien promettant une plus juste répartition des vaccins.
Cette inauguration sera aussi l’occasion d’entendre le président congolais Félix Tshisekedi, le prochain président en exercice de l’organisation, dont l’un des objectifs à court terme sera de mettre en place une réponse collective pour accélérer la campagne de vaccination en Afrique.
Des élections à distance contestées
Entre l’épidémie et les questions sécuritaires qui agitent le continent, mais encore la culture et le patrimoine, le thème de ce 34e sommet, surprenant au vu du contexte, les dirigeants devront également aborder les élections en internes de l’Union africaine.
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Moussa Faki Mahamat, ancien Premier ministre du Tchad, est seul candidat à sa propre succession à la tête de la Commission, l’organe exécutif de l’Union. Pour Elissa Jobson, responsable plaidoyer de l’ONG International Crisis Group, le sommet est l’occasion pour l’UA et les chefs d’État africains de reprendre pleinement leur rôle dans la résolution des conflits.
« Ce que nous aimerions voir c’est une Union africaine capable de jouer un rôle décisif dans la gestion des crises, notamment en Éthiopie. Fin novembre, l’Union africaine avait envoyé des médiateurs sur place mais ils n’ont pas été reçus par le gouvernement. Nous croyons que l’UA ne doit pas se laisser découragée et qu’il est important qu’elle reste engagée dans ce conflit, tout comme au Soudan par exemple.
En Centrafrique, après avoir joué un rôle important en 2019 pour aboutir à un accord entre les groupes armés et le gouvernement, nous avons désormais l’impression que l’organisation a laissé sortir de son radar ce conflit. Les chefs d’État africains préfèrent écouter leurs compatriotes plutôt que les Occidentaux. C’est pour cette raison qu’il est important que l’Union africaine prenne en charge la gestion des conflits en Afrique pour assurer une solution régionale aux crises. C’est une année cruciale pour l’UA. Il faut rapidement savoir qui sera à la tête de la commission, ce sera mieux pour le bon fonctionnement de l’organisation. »
Mais ces élections par vidéo-conférence pour ne sont pas du gout de tout le monde. Dans une lettre adressée au président de l’Union africaine, l’Ouganda demande ainsi un report des élections à la tête de l’UA d’un an. La lettre -datée du 25 janvier – est signée du président ougandais Yoweri Museveni qui explique qu’il est difficile de tenir des élections aussi importantes par vidéo-conférence. Plusieurs autres pays ont fait part de leurs inquiétudes quant à la tenue de ces scrutins à distance.
Inquiétudes qui ont été débattues, le week-end dernier par le bureau des chefs d’État qui a rejeté la demande de report de Kampala.
Pour le chercheur Pape Ibrahima Kane, il y a en effet des inquiétudes, quant à la transparence et la fiabilité d’un tel vote. C’est une première à l’UA, ajoute-t-il, et les enjeux sont importants.
Outre le poste de président de la commission, il y a en effet celui de vice-président, pour lequel l’Ouganda a une candidate : l’universitaire Pamela Mbabazi. Or la compétition s’annonce serrée. Elle va devoir affronter une candidature de poids : la gouverneure adjointe de la Banque nationale du Rwanda, Monique Nsanza-Baganwa.