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Soudan: la rentrée des classes se fait attendre

Dans un rapport publié en novembre, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (l’Unicef) tire la sonnette d’alarme sur les conséquences graves de la pandémie de Covid-19 pour les enfants. La rentrée scolaire a particulièrement été difficile dans les pays d’Afrique subsaharienne, où seulement un pays sur trois a été en mesure de rouvrir ses classes cette année. L’Unicef craint « une génération perdue » et appelle la réouverture des écoles au plus vite, en adéquation avec les mesures de protection sanitaires.

La situation est particulièrement préoccupante au Soudan, où certaines écoles ont dû fermer avant même l’irruption du coronavirus, au cours de la révolution qui a détrôné Omar el-Bechir. Pour cette année, la date de rentrée des classes avait été fixée à début septembre, mais elle a été continuellement reportée, au risque que certains enfants sortent complètement du système scolaire.

Des enfants jouent au foot, devant la porte scellée d’une école de Mayo, un quartier populaire de Khartoum. Ali Mohammed Mukhtar est instituteur. Cela fait huit mois qu’il n’a vu ses élèves : « Officiellement, ils disent que les écoles sont fermées à cause du coronavirus. Mais pour moi la raison est plus profonde. L’État n’a pas les moyens d’acheter le matériel nécessaire pour la rentrée des classes. Le nouveau gouvernement a voulu changer les programmes. Très bien ! Mais il faut fournir de nouveaux manuels scolaires et ils ne sont pas arrivés. En plus, de nombreuses écoles ont été détruites par les pluies torrentielles et les inondations au début de l’année. Pour toutes ces raisons, la rentrée va encore être décalée. »

On passe la porte d’une maison adjacente. Khadija, 17 ans, devrait être en terminale. Pour elle, c’était très difficile de ne pas décrocher : « Je ne suis pas allée à l’école depuis un an. Sauf au début de l’année, ils ont ouvert quelques jours pour qu’on puisse passer nos examens. Mais ils ont refermé tout de suite après. Sinon, je suis restée à la maison. C’était ennuyeux. J’ai suivi quelques cours d’anglais. Mais s’il n’y a pas un professeur pour nous expliquer, c’est trop dur. »

Près de la moitié des enfants au Soudan n’ont eu aucun moyen de suivre des cours depuis la fermeture des écoles. Selon le ministre soudanais de l’Éducation, Mohammed El-Tom, les reports successifs de la rentrée ont été catastrophiques pour les enfants : « Nombre d’entre eux risquent de complètement abandonner l’école. Surtout à l’école primaire, ces enfants vont oublier tout ce qu’ils ont appris. Ils vont devenir illettrés. Nous sommes inquiets également des mariages précoces pour les jeunes adolescentes. Pour notre ministère, il est urgent de rouvrir les écoles, mais cela n’est pas seulement de notre ressort. Si aujourd’hui on reçoit suffisamment de masques, demain les écoles peuvent rouvrir ! »

En novembre, le Partenariat mondial pour l’éducation a débloqué 61 millions de dollars pour soutenir les réformes du gouvernement de transition. Le projet est ambitieux : école gratuite pour les primaires, nouveau matériel scolaire et formation des professeurs, en donnant la priorité aux quartiers défavorisés. Mais dans cette banlieue sud de Khartoum, les habitants ne se font pas d’illusions, ils en ont assez des promesses.

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