La ville de Dakar doit-elle être – administrativement – supprimée en tant que collectivité ? Le ministre des Collectivités territoriales a lancé un pavé dans la mare. Selon Oumar Guèye, Dakar, comme quatre autres villes du pays – Pikine, Guédiawaye, Rufisque et Thiès –, « n’ont pas leur raison d’être ». Dans la perspective des prochaines élections locales, étape clé avant la présidentielle de 2024, la question, très politique, suscite un débat vif.
Avec notre correspondante à Dakar, Charlotte Idrac
Si Dakar n’était plus une ville, alors il y aurait 19 communes distinctes. Si Dakar n’était plus une ville, alors il n’y aurait plus de maire, mais un président du Conseil départemental. C’est l’option défendue par le ministre Oumar Guèye, qui se réfère au Code des collectivités territoriales. Mais pour l’expert en décentralisation, Amadou Sène Niang, l’État sénégalais ne cesse de « grignoter » sur les prérogatives de la capitale :
« Toutes les initiatives des villes qui sont entre les mains de l’opposition sont bloquées administrativement ou politiquement. La ville de Dakar avait initié un emprunt obligataire qui lui a été refusé par l’État à la dernière minute. S’ils s’acharnent à supprimer cette ville-là, c’est parce qu’il y a d’autres visées. »
« La bataille de Dakar »
Dakar échappe à la majorité depuis l’arrivée au pouvoir du président Macky Sall en 2012, avec l’ancien maire déchu, Khalifa Sall (de 2009 à 2018), puis l’une de ses fidèles, Soham El Wardini (depuis 2018). Un redécoupage électoral pourrait permettre d’affaiblir encore un peu plus l’opposition. Pour le politologue Papa Fara Diallo, le pouvoir cherche à tout prix à prendre le contrôle de la capitale :
« La bataille de Dakar aura lieu. (…) Le président Macky Sall est en train, avec la coopération de certains leaders d’opposition, de construire une grande coalition pour pouvoir conquérir le maximum de collectivités territoriales possibles pour pouvoir préparer sereinement les élections de 2024. »
Aucune date officielle n’a encore été fixée pour les élections locales prévues, en principe, avant mars 2021.