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JUSTICE

Les avocats camerounais dénoncent une «persécution» de leur profession

La colère des avocats camerounais ne retombe pas après l’arrestation et le placement en détention vendredi 20 novembre de deux de leurs confrères, Me Richard Tamfu et Me Armel Tchuemegne. Ils sont inculpés pour « outrage à magistrat et destruction » pour avoir pris part à un mouvement d’humeur dans un tribunal de Douala le 10 novembre qui avait entrainé une intervention musclée de la police et des échauffourées.

Réuni en conseil extraordinaire ce week-end, le Conseil de l’ordre des avocats a adopté une série de résolution fortes pour manifester son mécontentement.

Les résolutions adoptées ce week-end prévoient que du 30 novembre au 4 décembre, les avocats ne porteront plus leur traditionnelle robe noire dans les tribunaux mais surtout qu’ils cesseront jusqu’à nouvel ordre d’intervenir devant les juridictions criminelles, y compris la Cour suprême et le Tribunal criminel spécial, ainsi que devant les juridictions chargées du « contentieux électoral », y compris la Cour constitutionnelle. Et ce à quinze jours d’élections régionales.

Des mesures fortes saluées par Me Bissou, le président de la Commission des droits de l’homme au sein du barreau : « Vous savez qu’en matière criminelle et devant la Cour suprême, les avocats sont obligatoires. Donc ces juridictions ne peuvent pas statuer en l’absence d’avocats. Des mesures suffisamment fortes devront essayer de redorer le blason de l’avocature qui est de plus en plus sali. »

La semaine dernière déjà, le Conseil de l’ordre avait dénoncé « la brutalité » de l’intervention de la police, le 10 novembre lors d’une audience à Douala au cœur du litige. Plusieurs avocats avaient été blessés. Les avocats du Conseil qualifient également de « guet-apens » l’arrestation de Me Tamfu et Me Tchuemegne « sans convocation préalable ni mandat », selon lui. Ils contestent enfin la légalité de leur placement en détention, contraire selon eux au code de procédure pénale, dans la mesure où ils ne sont poursuivis que pour des délits et offrent des garanties de représentation. Le tout relevant selon eux d’une « persécution programmée » de la profession destinée à faire passer les avocats pour « des délinquants ».

De son côté, Édith Kah Wallah, présidente du Cameroon People’s Party (CPP) et initiatrice de la plateforme Stand Up for Cameroon, s’indigne de ces arrestations, selon elle en l’absence de mandat d’arrêt en violation de la loi. Interrogé par RFI à ce propos la semaine dernière, le ministre de l’Administration territoriale Paul Atanga Nji a déclaré ne pas avoir de commentaire à faire sur cette histoire, ajoutant que le juge était souverain au Cameroun.

Édith Kah Wallah craint qu’il ne s’agisse que d’un prétexte : Me Richard Tamfu, une voix engagée dans la défense des droits de l’homme au Cameroun, notamment pour les journalistes et les prisonniers anglophones :

M. Tamfu a été, dès le début de la crise anglophone, parmi ceux qui défendaient les différents activistes arrêtés […] Depuis vendredi soir, cet avocat se retrouve dans la même prison que ses clients […] Il n’a commis aucun acte de violence, aucun des avocats d’ailleurs.

Édith Ka Wallah: «on craint que ce soit plutôt parce qu’il est un défenseur des droits humains qu’il a été arrêté»

L’Association du barreau africain a exprimé sa solidarité hier dans un communique. Elle se dit « très préoccupée » par le fait que l’institution judiciaire soit régulièrement utilisée selon elle pour « réduire au silence les avocats camerounais ». Sollicité par RFI, le gouvernement camerounais n’avait pas encore réagi hier soir.

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