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Paix au Soudan: déclaration de principe entre le Premier ministre et le chef rebelle al-Hillu

Jeudi soir, le Premier ministre de la transition a signé une déclaration de principe avec Abdelaziz al-Hillu, chef de l’un des plus importants mouvements armés. Celui-ci faisait partie des grands absents lundi lors de la cérémonie de Juba durant laquelle plusieurs mouvements rebelles ont paraphé un accord de paix présenté comme historique pour les régions périphériques du Darfour, du Kordofan du Sud et du Nil bleu.

C’est une étape importante pour celui qui dirige la transition soudanaise depuis la chute de Omar el-Béchir. L’initiative vient du Premier ministre Abdalla Hamdok en personne. Celui-ci s’est rendu seul et discrètement à Addis-Abeba, sans mandat officiel du Conseil souverain ou des militaires. Il a discuté en tête à tête avec le très respecté Abdelaziz al-Hillu, un homme clé dans le sud du pays, et il a pris sur lui la signature d’une déclaration de principe historique. Un document succinct, mais qui rend possible un accord de paix effectif sur l’ensemble du territoire soudanais, selon plusieurs analystes.

Le texte tient sur une page. C’est une déclaration en six points, qui affirme des « principes communs » : le caractère « multiéthnique » et religieusement divers du Soudan, l’égalité « garantie par la loi » de « tous les peuples » du pays, la règle démocratique pour tous et surtout « la séparation de la religion et de l’État », et le « respect » du droit à « l’autodétermination » où cette règle ne pourrait s’appliquer. Une revendication ancienne et essentielle d’Abdelaziz d’al-Hillu.

Le statu quo sécuritaire est également affirmé. La faction du Mouvement populaire de libération du Soudan d’al-Hillu peut conserver ses armes et le cessez-le-feu en vigueur est perpétué, jusqu’à la conclusion d’un accord final avec Khartoum, basé sur ces principes communs. Il reste donc encore du chemin à parcourir.

« Même si on voit dans le très bref document qui a été signé un langage de compromis mais dans son esprit ( Abdelaziz al-Hillu), il est clair qu’il ne s’agit pas juste de rejoindre l’accord signé par les autres, avec lesquels il reste en compétition mais simplement de faire un pas plus vers des négociations.» Jérôme Tubiana, anthropologue spécialiste de la région

Un autre mouvement influent absent des négociations

De plus, un autre mouvement rebelle influent dans les camps de déplacés du Darfour ne participe pas pour le moment aux négociations officielles pour cet accord de paix global. Il s’agit du Mouvement de libération du Soudan d’Abdelwahid Mohamed al-Nour. Ce mouvement, qui a refusé tous les accords précédents, considère que les conditions n’y sont pas. Pour Abdelwahed al-Nour, cet accord, comme les précédents signés à Abuja (2006) et à Doha (2016) ne sera pas appliqué.

« Aujourd’hui, les militaires tiennent totalement le pays et contrôlent tous les rouages de l’Etat. Ils tiennent : le pouvoir, l’argent, l’économie, la sécurité. Il n’y a qu’el-Béchir qui a disparu, mais l’Etat profond est toujours là et toujours aux mains des militaires. Pour cela, notre combat politique est un réel et grand combat afin de permettre à un Etat civil d’accéder au pouvoir. Sans un gouvernement civil, il ne sera pas possible de faire de percée ni en politique, ni en économie ni de mettre fin aux guerres ni de construire l’Etat de droits de citoyenneté et de développements équitable pour tout le Soudan. Notre projet vise à bâtir l’Etat en traitant les racines historiques de la crise. Nous voulons éradiquer totalement les raisons qui poussent. Si nous ne faisons pas ça d’une manière globale et on s’adresse seulement à ceux qui porte les armes, demain il y aura la guerre à Kordofan ou ailleurs. »

« Le camarade Abdelaziz al-Hillu est un grand militant, il est notre partenaire. Notre relation avec lui est stratégique. Il défend son projet pour un nouveau Soudan, et nous défendons le projet d’un Soudan laïc, libéral et fédéral, ce qui nous rapproche beaucoup. Notre relation est très forte, et nous œuvrons ensemble pour changer le Soudan ».
Abdelwahed al-Nour, chef du Mouvement de libération du Soudan

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