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La difficile identification des migrants morts en mer en Tunisie

Plus de 20 000 migrants sont morts en Méditerranée depuis 2014, selon les Nations unies. La très grande majorité des corps repêchés lors de ces naufrages restent anonymes. Mais depuis quelques années, avec le soutien du Comité international de la Croix-Rouge, des procédures se mettent en place pour collecter le plus d’informations possible sur les corps, afin de permettre leur identification. Les proches de disparus peuvent se rapprocher d’organisations internationales comme le CICR pour lancer une recherche. Parmi les pays qui appliquent ces procédures : la Tunisie. Reportage à Sfax (sur la côte, à environ 300 km de Tunis), l’un des principaux points de départ des migrants vers le Vieux continent.

Le soleil chauffe la terre du cimetière Lejmi. Sur un côté, des tombes anonymes. celles de dizaines de personnes, originaires d’Afrique subsaharienne, mortes dans le naufrage d’une embarcation de migrants au large de Sfax, début juin. Mounir Elloumi, maire de la ville :

« Nous avons procédé à cet enterrement dans des tombeaux séparés, avec une identification sous des numéros bien clairs, qui pourraient être nécessaires pour identifier de manière définitive l’origine de l’enterré. »

Chaque tombe possède un numéro unique, qui correspond à celui d’un dossier, dans lequel sont regroupées toutes les données collectées sur les corps. Pour le constituer, le service de médecine légale de l’hôpital Habib Bourguiba travaille avec la justice, la police scientifique, et différents spécialistes (radiologues, dentistes). Le professeur Samir Maatoug est le chef de ce service :

« On a noté toutes les caractéristiques, que ce soit les vêtements, les chaussures, les cicatrices, les tatouages, etc. Puis on a fait les empreintes digitales pour certains, des prélèvements de cartilage pour une éventuelle identification génétique. »

Sur les 61 corps repêchés lors de ce naufrage, seul celui du capitaine tunisien du bateau a jusqu’à présent été identifié avec certitude. Un prélèvement a également été effectué sur une mère qui recherche sa fille afin que les données puissent être comparées. En attendant d’autres demandes de la part de proches de disparus, tous les dossiers sont conservés.

Bilal Sablouh, coordinateur régional de médecine légale du Comité international de la Croix Rouge, qui participe à l’harmonisation des procédures de collecte de données explique :

« Les personnes peuvent approcher le CICR et les différents Croissant-Rouges et Croix-Rouges dans le monde et ouvrir une demande de recherche. Donc après l’ouverture d’une demande de recherche, on commence à faire les différentes clarifications et on commence à chercher le sort de cette personne portée disparue. »

Même si quelques corps seulement ont été identifiés jusqu’à présent, le professeur Maatoug et son équipe continuent de garder une trace des disparus :

« Les familles viennent même 2 ans, 3 ans, 4 ans après, on a déjà l’empreinte génétique. A tout moment, même 10 ans après, même 20 ans après, ils peuvent reconnaître les siens. »

Avec l’espoir que des parents, des enfants ou même des petits enfants, viendront un jour pour pouvoir enfin leur redonner un nom.

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