Le président tunisien, Kaïs Saïed, est le premier responsable étranger à être reçu à l’Elysée depuis la fin du confinement. Il effectuera, lundi 22 juin, une visite officielle de vingt-quatre heures à Paris, en réponse à l’invitation du chef de l’Etat français, Emmanuel Macron. Lors de cette visite, les deux présidents devront s’entretenir, entre autres sujets, sur la situation en Libye.
Cette visite du président tunisien était prévue, à l’origine, en février dernier mais elle a été ajournée, en raison du coronavirus. C’est une visite « de travail et d’amitié », lit-on dans un communiqué du palais présidentiel tunisien. Elle sera l’occasion de consolider les relations bilatérales entre les deux pays et d’échanger sur la situation économique et sécuritaire en Tunisie.
Emmanuel Macron et Kaïs Saïed doivent aussi se pencher sur les derniers développements du dossier libyen. Ce pays possède une frontière de 460 km avec la Tunisie et l’insécurité en Libye pèse lourdement sur la stabilité politique et économique tunisienne.
La neutralité de Tunis mise à rude épreuve
Tunis, en effet, qui a toujours fait de la neutralité un principe en matière de politique étrangère, se trouve aujourd’hui dans une position difficile. Le pays est divisé avec notamment les partis de la mouvance de l’islam politique qui prennent parti pour les islamistes libyens et pour l’intervention turque en Libye.
Ainsi, les positions de Rached Ghannouchi, chef du Parlement et président du parti Ennahdha, ne sont pas passées inaperçues et lui ont valu deux interrogations au Parlement, depuis le début de l’année, et une motion de censure, au début de ce mois de juin. On l’accusait alors d’avoir un agenda secret non rapporté sur celui du Parlement.
Par ailleurs, sa visite, en janvier, à Ankara et ses récentes félicitations à Fayez el-Sarraj pour avoir vaincu Khalifa Haftar dans l’ouest libyen, ont beaucoup agacé, au point que c’est le président lui-même qui est sorti de son silence pour faire une mise au point, en mai dernier. Ce dernier a accusé Ghannouchi de dépasser ses prérogatives en se mêlant de la politique étrangère, chasse gardée de la présidence, selon la Constitution. « Il n y’a qu’un seul président en Tunisie », avait alors martelé Kaïs Saïed.
Pour les partis laïques, il est clair que le président turc, Erdogan, nostalgique de l’empire ottoman, essaye de rallier les islamistes tunisiens, comme partout en Afrique du nord, à ses causes en Libye.
Une aide financière pour la Tunisie
La visite du chef de l’Etat tunisien à Paris intervient également au moment où la France multiplie les contacts internationaux pour développer une position commune vis-à-vis de la Libye. Sur fond de tension avec Ankara, le ministre français des Affaires étrangères recevra d’ailleurs, ce lundi, son homologue grec, avant de faire le déplacement à Londres et à Berlin pour discuter précisément de la Libye, de la Turquie et de l’Otan.
Parmi les autres dossiers prioritaires figurent la coopération sécuritaire en méditerranée et l’aide financière à la Tunisie qui traverse la plus mauvaise crise économique, depuis son indépendance. « Il va y avoir des annonces au niveau financier », affirment ainsi des sources tunisiennes.