Dans les prochaines semaines, un nombre indéterminé de locataires à Abuja et Lagos, sans activité actuellement (et donc sans revenu) en raison de la pandémie de coronavirus, risquent de se retrouver sans logement pour défaut de paiement de loyer, alors que la loi est censée les protéger.
Ola est confiné avec son épouse et sa fille de 3 ans dans un appartement deux chambres salon sans balcon. Ce trentenaire dirige d’une société de sécurité depuis près de dix ans. Fin mars, quelques jours après la première mise en quarantaine d’Abuja, le propriétaire du logement d’Ola a envoyé un SMS très clair : le bail stipule le paiement d’un an de loyer en une fois, Ola doit régler la prochaine échéance au plus tard à la fin mai.
« Mon compte est à sec. Si la pandémie continue et qu’aucun client ne me paie, dès la moitié du mois prochain. Je ne sais pas comment faire face. Même si je dis que nous avons de la nourriture à la maison, nous mangeons tous les jours. Et nos réserves diminuent. Peut-être d’ici un mois prochain, nous n’aurons plus rien à manger. Dès le 1er mai, mon propriétaire sera derrière mon dos. Ce qui signifie que je devrais payer. Et là le problème va commencer. »
« Les banques ont même peur d’accorder des prêts »
Ola emploie 1 000 personnes affectées à la surveillance de villas et d’immeubles à Abuja et Lagos notamment. 90 % de ses clients sont des membres de la diaspora nigériane vivant aux États-Unis et au Royaume-Uni. Et depuis le début de la pandémie du coronavirus Covid-19, Ola attend le paiement d’au moins 3 factures sur 4 tout en maintenant ses services de gardiennage.
« Les banques ont même peur d’accorder des prêts. Même un petit crédit à la consommation. Mes amis à qui je pourrais m’adresser ont leurs propres problèmes. Mes clients débiteurs ne travaillent pas en ce moment. En fait, quand je tente de les appeler, ils ne décrochent pas le téléphone. Ma situation est tout simplement pathétique. Comme celle de n’importe quelle Nigériane ou Nigérian. »
Une loi du côté des locataires, mais…
Les lois nigérianes protègent les locataires lors de cas de force majeure, comme une pandémie. Mais parfois sur le terrain, la réalité est différente, comme l’explique Sonia Vincent, une gestionnaire de biens immobiliers.
« Ici au Nigeria, un propriétaire quand il met un logement en location, il compte coûte que coûte sur un revenu régulier pour financer une autre affaire, ou prendre soin de sa famille. C’est juste une question de business, et il n’y a pas de sentiment. Certes en ce moment personne ne risque d’être expulsé avec la quarantaine à Abuja. Mais après la pandémie, si le bail d’un ou d’une locataire a expiré auparavant et si rien n’a été payé, la personne devra quitter le logement. »
Pour Ola et sa famille, le compte à rebours est enclenché.
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