Dans le nord du Rwanda, les populations vivant près de la frontière avec l’Ouganda sont affectées par les tensions entre les deux pays, qui s’accusent mutuellement de déstabilisation. Malgré un accord de sortie de crise signé en août, la libre circulation entre les deux pays est actuellement entravée et les habitants décrivent une situation difficile.
Au poste-frontière de Cyanika, les barrières sont fermées. La police confirme que la circulation est bloquée côté rwandais. Résultat : à Kidaho, dernier village avant l’Ouganda, les activités tournent au ralenti. Seul ce jeune homme accepte de témoigner, mais il souhaite rester anonyme.
« Cette situation nous a tous appauvris, et nous avons du mal à nous nourrir. Par exemple, les Ougandais récoltent leurs pommes de terre plus tôt, donc nous avions l’habitude de les acheter là-bas en attendant que ce soit le moment de notre récolte. Mais maintenant, même les patates douces, on ne peut plus en avoir, car il n’y a pas moyen de traverser », confie-t-il.
Pour lui, le problème n’est pas seulement économique. Comme beaucoup d’habitants de la région, il a de la famille en Ouganda. « Ma sœur s’est mariée en Ouganda et récemment, un membre de sa belle-famille est mort. Mais nous n’avons pas pu aller aux funérailles, car il est interdit de se rendre là-bas. On ne peut pas leur rendre visite, pour aucun évènement. Même si elle accouche, on ne pourra pas y aller. »
En juin dernier, trois organisations de la société civile basées en Afrique de l’Est ont porté plainte contre les gouvernements du Rwanda et de l’Ouganda devant la Cour de justice de l’Afrique de l’Est. Elles dénonçaient une fermeture arbitraire de la frontière, contraire selon elles au traité d’établissement de la Communauté d’Afrique de l’Est et avec de lourdes conséquences pour les entreprises et les familles de la région.
Le Rwanda accuse notamment l’Ouganda de détenir illégalement et de torturer ses ressortissants, mais aussi de soutenir des groupes hostiles au gouvernement de Paul Kagame. De son côté, Kampala a accusé des Rwandais d’Ouganda d’espionnage. Quarante d’entre eux ont été arrêtés en juillet dernier.