Un public plus nombreux que d’habitude s’est déplacé à la Commission vérité et réconciliation en Gambie mercredi 16 octobre pour assister à l’audition d’Edward Singhateh, ancien membre de la junte militaire qui a pris le pouvoir en 1994 et figure du régime de Yahya Jammeh.
Vivant actuellement au Nigeria où il est consultant, Edward Singhateh est cité dans de nombreuses affaires, dont la mort du ministre des Finances, Ousman Koro Ceesay en 1995. Pour cette première journée d’audience, le témoin a pris soin d’imposer son récit.
Costume cravate impeccable, anglais parfait, parole ponctuée d’amabilités, l’avocat de formation sait se défendre. Celui qui a servi Yahya Jammeh pendant 13 ans commence par se détacher du dictateur. « Avec tous les témoignages que j’ai entendus sur lui jusqu’ici, j’en viens à croire que je ne le connaissais pas si bien que cela. »
Sur Facebook, un militant des droits de l’homme s’agace : « malgré sa voix d’ange et ses habits d’innocent, Edward ne peut pas dissimuler ses crimes ! ». L’ancien membre de la junte est cité dans au moins six dossiers.
Nuit de torture
La Commission commence par étudier sa participation à une nuit de torture dans la prison Mile 2. L’un des détenus se souvient d’avoir été frappé à l’aide d’une Kalachnikov.
« Peut-être que, soit j’étais la personne qu’il a vue avant de s’effondrer, soit il se souvient de moi et ma peau claire comme une bougie dans l’obscurité », explique Edward Singhateh.
« Il semble plutôt de souvenir d’avoir été frappé par la petite bougie », rétorque un avocat. « Je ne l’ai pas frappé », répond l’ancien homme du régime.
Lors de cette nuit de la torture, trois témoins l’ont décrit comme complètement ivre et vociférant dans la prison à la recherche des détenus à tabasser. La Commission devra déterminer qui était vraiment monsieur Edward Singhateh. Son audition se poursuit jeudi 17 octobre.