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Procès du putsch au Burkina: les réactions au terme d’un long procès

Au Burkina Faso, après 18 mois de procès, le général Gilbert Diendéré, ex-chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré est condamné à 20 ans et Djibril Bassolé, un autre ténor du régime de Blaise Compaoré, écope de 10 ans de prison ferme. Une dizaine de personnes sur les 84 accusés ont été acquittées pour infractions non constituées et au bénéfice du doute. Un verdict salué par les avocats des parties civiles.

La salle d’audience a refusé du monde. Le dispositif sécuritaire a été renforcé. Et il a fallu un peu plus d’une heure au tribunal pour donner le verdict de ce procès.  Refusant  de commenter les différentes peines, maitre Prosper Farama, l’un des avocats des parties civiles, estime que le plus important pour les victimes, c’est la tenue de ce procès.

« Pour les Burkinabè que nous sommes, aujourd’hui c’est un jour historique. Qui eut cru, un jour, que le général Diendéré, le général Bassolé et tous ces militaires qui, il y a quelques années de cela, étaient les hommes forts de ce pays, pourraient répondre à des questions de simples victimes ? Pour nous, déjà, c’est cela, la victoire dans ce procès. C’est une victoire pour le peuple burkinabè. C’est une victoire pour l’État de droit », souligne-t-il.

« Ce n’est pas parce qu’ils ont condamné des gens que nous sommes contents, nous sommes contents parce que le droit a été dit aujourd’hui. Donc, les parents de victimes sont très contents parce qu’aujourd’hui ils ont su que dans un État de droit, il faut que la justice s’exprime. Aujourd’hui, nous sommes très fiers et nous demandons à tout le monde d’éviter la violence » renchérit Massirou Guiro, du mouvement Plus rien ne sera comme avant.

Le général Gilbert Diendéré, présenté comme l’un des cerveaux de ce coup d’État manqué, a été  condamné à 20 ans de prison ferme. Une peine que rejette son avocat, maître Mathieu Somé, qui dénonce un procès politique.

« Vingt ans, c’est excessif. Est-ce qu’il y avait un État légal ? Tout pouvoir légal doit tirer sa source de la Constitution. Or, le pouvoir qui était en place le 5 septembre était assis sur une charte et non la Constitution. Donc, il n’y avait pas de régime légal. Pourquoi nous retenir et nous condamner pour attentat à la sûreté de l’État ? C’est un jugement politique. Il est ostensiblement politique », estime-t-il.

« Comment quelqu’un qui n’a ni été auteur, ni complice de ce coup d’État peut avoir trahi ? Je me demande qui il a trahi, à quel moment il a trahi et comment est-ce qu’il a trahi ? Les choses qui lui semblent être reprochées semblent être les écoutes téléphoniques qui n’ont jamais pu être authentifiées à qui que ce soit », dit Aziz Dabo, porte-parole de la Nouvelle Alliance du Faso.

Les différents accusés sont restés calmes à l’annonce du verdict et des peines. Ils ont quinze jours pour faire appel de cette décision du tribunal militaire.

Le Burkina Faso, pendant plus d’une trentaine d’années, sous l’ancien régime, a connu une certaine impunité. Aujourd’hui, le fait de savoir que l’on peut être condamné par la justice pour les actes que l’on a posés, quelle que soit sa position politique, militaire ou civile, cela est un message très fort que la justice burkinabè vient de lancer.

Quels enseignements peut-on d’ores et déjà tirer de ce procès ?
02-09-2019 – Par Carine Frenk

Les responsables de la société civile, les parents des victimes et les blessés attendent quant à eux la deuxième phase du procès. Celle qui se penchera sur l’indemnisation des victimes et des blessés.

« L’important, c’est que des condamnations aient été prononcées », estime Patrice Bazié, le secrétaire général de l’Association des parents des victimes du coup d’État. « Pour nous, parents de victimes, le plus important est qu’on ait su ce qui s’est passé et qu’on ait su qui était derrière tout ça. Les peines ont été prononcées. Mais que ce soit 10, 20 ou 25 ans, là n’est pas le plus important. Le plus important est que ceux qui ont eu à commettre les fautes ont été condamnés. Ce qui est un peu frustrant, c’est qu’on a l’impression qu’ils se jetaient tous un peu la balle : « c’est pas moi qui ait fait ceci, c’est l’autre, je n’étais pas au courant… » Mais ça apaise quand même le coeur des parents des victimes. Peut-être que maintenant on va pouvoir faire le deuil et que les gens vont recommencer à vivre normalement. »

Pour Ali Sanou, secrétaire général du Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples, se réjouit lui aussi qu’un procès, en soi, ait pu avoir lieu. « C’est la première fois dans notre pays, où les crimes de sang notamment se sont multipliés depuis plusieurs années, qu’un procès est initié et qu’il va jusqu’à son terme. C’est une victoire de notre peuple qui s’est mobilisé. Nous espérons que ce verdict fasse déchanter tous ceux qui rêvent de conquérir le pouvoir par un coup d’État. Nous espérons que les verdicts qui ont été rendus seront effectivement appliqués, et que sur l’autel de la réconciliation nationale on ne viendra pas essayer d’amnistier des personnes qui ont eu à commettre des violations des droits humains. »

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