En République démocratique du Congo, les deux poids lourds de l’ancienne majorité présidentielle ont déposé leur candidature pour devenir président du Sénat. Adoubé par le sortant Joseph Kabila, l’ex-Garde des Sceaux et chef rebelle Alexis Thambwe Mwamba fait figure de favori. Son challenger et ancien allié, l’ancien ministre de l’Économie, Modeste Bahati Lukwebo, est lui aussi allé jusqu’au bout, malgré son exclusion du FCC et les menaces du même type dont font l’objet ses sénateurs.
Modeste Bahati Lukwebo est arrivé au Palais du Peuple peu avant midi lundi. Outre les membres de son équipe de campagne, l’autorité morale de l’AFDC et Alliés, exclu du FCC, était accompagné des autres candidats aux différents postes du bureau définitif du Sénat.
Il a dit toute son assurance quant à l’issue victorieuse du vote de samedi prochain : « L’acte que nous venons de poser en donnant notre candidature confirme que nous voulons aller jusqu’au bout, et jusqu’à la victoire », a-t-il déclaré.
Alexis Thambwe Mwamba, le candidat du FCC désigné par Joseph Kabila, est arrivé environ deux heures et demie plus tard, au milieu d’un cortège impressionnant de véhicules. Lui aussi avait dans son groupe de nombreux sénateurs parmi lesquels des prétendants aux autres postes du bureau définitif de la chambre haute du Parlement.
Pour l’ex-ministre de la Justice, sa famille politique étant majoritaire au Sénat, la victoire est certaine : « Nous n’avons mis aucune affiche parce que nous ne sommes pas nerveux, nous sommes sûrs que nos sénateurs vont nous suivre, a-t-il expliqué. Nous avons la majorité absolue au Sénat comme nous l’avons aujourd’hui à l’Assemblée nationale. »
Le Palais du peuple, siège du Parlement, était quadrillé par les forces de l’ordre, l’accès filtré. Les manifestations politiques sont interdites sur toute l’étendue de la ville jusqu’à la fin de la semaine. Les candidats auront deux jours, mercredi et jeudi, pour mener campagne, avant le verdict samedi.
Un poste stratégique
Pourquoi tant de tensions autour de ce poste ? En cas de vacance pour cause de décès du président, de démission ou pour toute autre cause d’empêchement définitif, au titre de la Constitution congolaise, c’est au président du Sénat d’assurer l’intérim et d’organiser la nouvelle élection présidentielle. Joseph Kabila a longtemps été soupçonné de vouloir briguer ce poste, justement pour pouvoir à tout moment remplacer son successeur Félix Tshisekedi.
Dans son entourage, on dit que l’ancien chef de l’État tient à y placer ses plus proches, comme Alexis Thambwe Mwamba à la présidence et Evariste Boshab à la première vice-présidence. Verrouiller le bureau du Sénat, comme de l’Assemblée nationale, c’est aussi s’assurer de pouvoir convoquer le Congrès. Les chambres basse et haute réunies ont parmi leurs compétences de pouvoir déférer le président de la République devant la Cour constitutionnelle, notamment pour haute trahison et délit d’initié ou même de voter une réforme de la Constitution.
Pour un politologue congolais, pas de doute, si les négociations en vue de former le premier gouvernement de Félix Tshisekedi n’on pas abouti, c’est parce que Joseph Kabila souhaitait d’abord contrôler tous ces leviers et pouvoir à tout moment hausser le ton vis-à-vis de son partenaire et successeur à la tête de l’État. Raison pour laquelle la candidature de Modeste Bahati Lukwebo serait si mal perçue, lui qui au lendemain de la proclamation des résultats de la présidentielle avait rendu une visite de courtoisie au nouveau chef de l’État.