Depuis que des soldats ont massacré plus d’une centaine de civils lundi 3 juin, Khartoum vit au ralenti. Les paramilitaires sont encore bien visibles en ville et s’en prennent régulièrement aux habitants. Résultat : de nombreux magasins sont fermés. RFI s’est rendu dans l’un des rares supermarchés ouverts.
C’est l’affluence ce jeudi soir dans cette supérette de Khartoum. Après le massacre de lundi et plusieurs jours de violences dans la capitale qui ont fait au moins 108 morts et plusieurs centaines de blessés, selon un comité de médecin, les gérants ont finalement rouvert.
« J’avais fermé lundi et mardi parce qu’un massacre était en cours. Ça tirait de partout. J’ai ouvert aujourd’hui parce que des clients m’ont appelé disant qu’ils n’avaient nulle part où aller, raconte Muhammad Hassan. Mais les habitués sont peu nombreux. Ils ont encore peur de sortir. Ceux qui viennent sont de passage. Ils s’arrêtent parce qu’ils trouvent enfin un endroit où acheter à manger. »
Parmi les clients, certains ont des listes de courses impressionnantes. Tariq Ibrahim a acheté 20 kilos de farine, beaucoup de sucre, de viande surgelée, de pain et d’huile. Après les tensions des derniers jours, il a voulu prendre ses précautions.
« On a peur d’une nouvelle explosion de violence, qui entraîne une fermeture des magasins. Donc je fais des réserves, explique-t-il. Ça fait longtemps qu’on subit des pénuries de billets de banque. Donc on dépend des cartes. Mais elles ne fonctionnent plus parce qu’internet est coupé depuis lundi. Or, ce magasin a de la connexion haut débit, ma carte marche ici. Et puis surtout, ma femme me l’a demandé, donc je ne peux pas lui désobéir. »
Une situation qui pénalise aussi les marchés classiques. À cause du danger qui rôde dans les rues, les grossistes peinent à venir vendre leurs marchandises et les clients potentiels n’osent plus sortir de chez eux.
Depuis trois jours, on voit une grave détérioration de la situation au Soudan, depuis que les forces de soutien rapide, les RSF, ont attaqué le sit-in où les manifestants protestaient pacifiquement. Ils agissent sous les ordres d’Hemetti, le numéro deux du Conseil militaire de transition. C’est un groupe paramilitaire qui, dans le passé, s’est rendu responsable de graves atteintes aux droits humains au Darfour, et on voit qu’ils sont en train d’utiliser les mêmes méthodes aujourd’hui pour écraser la protestation