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Aziz Chouaki (1951-2019), l’homme révolté des lettres algériennes

Décédé brutalement mardi le 16 avril, le Franco-Algérien Aziz Chouaki était un homme de nombreux talents. Dramaturge, romancier, nouvelliste et poète, mais aussi guitariste et rockeur, ce fils et petit-fils d’instituteurs en Algérie a renouvelé l’écriture littéraire algérienne en imprégnant l’écrit de la saveur et du chaos de la langue parlée. Fuyant les islamistes qui dominent la vie politique et intellectuelle dans son pays dans les années 1980-1990, il a fait l’essentiel de sa carrière littéraire en France.

« Je suis un Oriental, avec tout le jasmin et la vase, mais aussi un parfait clone de la colonisation. Gosse, j’ai pleuré Blandine dans nos vieux livres jaunes à gravures ; à l’école communale j’admirais Bayard, sans peur et sans reproche, parmi les fumets de chorba du ramadan. Aujourd’hui l’histoire, le drame, l’exil. Et l’écrire toujours là, à adoucir les mœurs… »

Ainsi parlait le romancier et l’homme de théâtre algérien Aziz Chouaki, qui vient de disparaître en pleine maturité, à l’âge de 67 ans. Considéré par beaucoup comme l’un des écrivains algériens les plus inventifs de sa génération, l’auteur deL’Etoile d’Alger – le roman qui l’a fait connaître – a produit une œuvre incandescente, engagée dans la vie de la cité, mais non exempte d’humour et d’ironie.

La disparition de cet auteur singulier marque peut-être la fin d’une époque dans la littérature de son pays, où les dérives de la société postcoloniale algérienne ont été propices à l’émergence de quelques-unes des grandes voix des lettres francophones, aujourd’hui disparues : Tahar Djaout, Assia Djebar, Mouloud Ferraoun, pour ne citer que ceux-là…

Une famille de lettrés

Né en Algérie en 1951, Aziz Chouaki est romancier, dramaturge et musicien. © site d'Aziz Chouaki

Aziz Chouaki est décédé le 16 avril dernier d’une crise cardiaque, à Paris, où il s’était exilé dans les années 1990, à un moment où l’Algérie était le théâtre d’émeutes populaires sur fond de montée del’islamisme radical. Ce sont des menaces de mort prononcées contre lui par les islamistes qui l’avaient persuadé de quitter son pays. « J’étais accusé d’être le diable, d’être musicien, d’être beau gosse, d’être écrivain. J’étais une cible alléchante pour les Frères musulmans. Je dirigeais un club de jazz, l’un des seuls d’Afrique du Nord », avait-il déclaré dans un entretien récent accordé au site du magazine littéraire En attendant Nadeau.

C’est sans doute aussi son appartenance à une famille de lettrés qui le rendait suspect aux yeux des musulmans puristes déterminés à imposer la loi d’Allah dans cette ancienne colonie française. Aziz Chouaki est né en 1951, à Tizi Rached, en Kabylie, dans une famille d’instituteurs. Son grand-père, Mohamed-Said Hadjeres, était le premier instituteur musulman de l’Ecole normale durant la période coloniale française. Sa famille avait dû fuir la Kabylie pendant la période de la guerre d’indépendance (1954-62) pour venir s’installer dans la banlieue d’Alger, où le jeune Chouaki a grandi. Il y vivait avec sa mère qui était, elle aussi, institutrice. Elle lui lisait Les Contes de Grimm en français et en kabyle. Ce fut toutefois une période traumatisante pour ce jeune garçon, à cause à la fois des atrocités de la guerre, et de l’abandon du foyer familial par son père.

« Un étourneau du cœur »

L’adolescent se réfugia dans la musique. Inlassablement, il écoutait les Beatles, Jimi Hendrix, Wes Montgomery à la radio, formant son ...   

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