Après les témoins, la présentation des pièces contre les accusés et les joutes oratoires des différentes parties, la parole est maintenant aux victimes dans ce procès. Sur environ 300 victimes, 60 personnes ont été invitées à témoigner, à expliquer ce qui s’est passé dès le 16 septembre jour de l’arrestation des autorités de la transition. À la barre où dans l’assistance, difficile pour les victimes ou leurs parents de contenir leurs larmes.
El Hajd Aboubacar Yanogo était loin d’imaginer que le 17 septembre son frère cadet serait parmi les premières victimes du coup d’État manqué. Assis sur un banc devant son garage, des soldats tirent sur lui : « On a tiré quatre balles. Toutes ses dents se sont enlevées. C’est moi qui fermé sa bouche. Il y avait une dame qui pleurait, qui m’a donné son pagne. J’ai dit : c’est mon petit frère. »
Étienne Kologo a perdu son neveu le 18 septembre 2015. « Apollinaire marchait sur le bas-côté de la voie », raconte son oncle, « lorsque des soldats de l’ex-RSP cagoulés lui ordonne de retirer les barricades dressées par des manifestants ». Après s’être exécuté, souligne l’oncle, entre deux sanglots, « l’un des soldats tire sur lui, à bout portant avec une kalachnikov ». Apollinaire a reçu quatre balles. Son corps était méconnaissable selon son oncle.
Silence dans la salle
Durant des heures, les victimes ou leurs parents racontent ce qu’ils ont subi. Dans la salle, c’est le silence. Pour le parquet militaire, il est inacceptable que des soldats de l’armée burkinabè tirent sur les populations aux mains nues.
Pour maître Prosper Farama, l’un des avocats des victimes, l’objectif des soldats de l’ex-RSP n’était pas le maintien d’ordre : « Toutes les armes utilisées sont des kalachnikovs, des pistolets automatiques. Jamais il n’a été question d’une arme de dispersion de foule. Partout où ils sont intervenus, ils ont tiré, tué, ils étaient cagoulés. »
60 personnes sur les 300 victimes ont été sélectionnées. Leur témoignage fera place aux réquisitions du parquet et aux plaidoiries des avocats.