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Génocide des Tutsis au Rwanda: 25 années de procédures judiciaires en France

Trois condamnations, quatre non-lieux et une vingtaine de procédures en cours : les enquêtes françaises sur le génocide rwandais ont été longues et menées sous tension. Les premiers verdicts prononcés à Paris ont été accueillis avec soulagement par les parties civiles qui y ont vu la volonté de la France de ne pas laisser ces crimes impunis.

« La France a mis longtemps à se mettre en marche, pour Alain Gauthier, président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda. Il a fallu attendre 2012 et la création du pôle crime contre l’humanité au TGI de Paris pour voir enfin des juges d’instruction à temps plein nommer pour s’occuper des enquêtes sur le génocide. Toutes les plaintes emmènent de personnes physiques ou à l’initiative de l’association que nous avons créée en France. Il suffit qu’un pouvoir politique ne donne pas à la justice les moyens de fonctionner, et c’est ce qui s’est produit jusqu’à l’année 2000, pour que le système judiciaire piétine. »

Le 14 mars 2014, Pascal Simbikangwa, ex-officier de la garde présidentielle, était condamné à 25 ans de réclusion criminelle. Une peine confirmée deux ans plus tard. Un procès fondateur, puisqu’il s’agissait de la première comparution devant une cour d’assises d’un génocidaire rwandais, réfugié en France.

Plusieurs procédures en attente

Les jurés ont reconnu l’ancien capitaine, coupable d’avoir organisé à Kigali des barrages pour filtrer et exécuter des Tutsis. Si le procès Simbikangwa a permis de s’approcher des cercles du pouvoir, en 2016 puis en appel en 2018, les procès de deux bourgmestres ont donné à voir un crime de proximité, un génocide entre voisins sur les collines du Rwanda. Octavien Ngenzi et Tito Barahira, deux anciens maires du village Kabarondo, ont été condamnés à la perpétuité pour crime contre l’humanité et génocide.

Trois autres Rwandais réfugiés en France pourraient comparaître à leur tour prochainement aux assises. Ainsi, l’ex-chauffeur de miliciens, Claude Muhayimana, qui a vu son renvoi confirmé jeudi dernier par la cour d’appel de Paris, a décidé de se pourvoir en cassation. Les deux autres suspects, l’ex-préfet Laurent Bucyibaruta et le médecin Sosthène Munyemana, attendent que leur cas soit examiné par la chambre de l’instruction.

La question que je me pose, c’est pourquoi la France a attendu si longtemps pour agir, pour exercer ses responsabilités internationales puisqu’il s’agit de la convention de 1948, il y a une obligation à juger. Pourquoi avoir attendu si longtemps? Puis quand bien même qu’il y ait ce signal-là de pouvoir maintenant agir, pourquoi cette justice est lente. Et finalement à la fin, c’est une justice pour qui ? Car en tout cas les victimes, elles, auraient souhaité que la justice se mette en place immédiatement.

Diogène Bideri, conseiller juridique principal à la Commission nationale de lutte contre le génocide (CNLG)
07-04-2019 – Par RFI

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