En Algérie, les journalistes de la télévision publique algérienne se sont mobilisés à leur tour pour dénoncer la couverture médiatique des manifestations contre un cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika. De nouvelles manifestations sont attendues. Dans ce contexte tendu, comment la France réagit-elle ? Selon nos informations, mardi 26 février, Emmanuel Macron a appelé Xavier Driencourt, l’ambassadeur de France en Algérie, pour évoquer la situation sur place avant de lui demander de faire l’aller-retour à Paris hier pour qu’il rencontre le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian.
C’est un signal fort qu’a souhaité envoyer l’Elysée. Mardi, Emmanuel Macron s’est entretenu directement par téléphone avec Xavier Driencourt, l’ambassadeur de France en Algérie, « un coup de fil peu commun », précise-t-on de source diplomatique. De surcroît, le président a surtout demandé au diplomate de venir le lendemain à Paris pour partager ses analyses avec Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères. Une manière pour l’Elysée de montrer que l’exécutif et le gouvernement suivent l’évolution de la situation au plus près.
Le sujet a d’ailleurs été évoqué mercredi en Conseil des ministres. Quel regard porte alors Paris sur cette contestation naissante ? De source diplomatique, on dit avoir conscience de l’importance de ce mouvement social. « Sans pour autant perdre de vue la puissance du FLN et le soutien populaire qui demeure envers le président Bouteflika », dit-on à l'Elysée.
La France entend donc adopter une position plutôt prudente sans céder au catastrophisme, précise-t-on, sous-entendu : rien ne justifie pour l’heure la crainte d’une augmentation des flux migratoires.
■ Un rassemblement contre la censure en Algérie
Mercredi 27 février, des journalistes de la télévision publique nationale se sont rassemblés pour réclamer leur droit de travailler librement et sans pression. Un fait rare pour des journalistes du service public. La veille ce sont leurs collègues de la radio publique qui ont organisé un sit-in pour le même motif : pouvoir informer librement les Algériens des manifestations qui se déroulent en ce moment dans le pays contre la candidature du président sortant Abdelaziz Bouteflika.
« Non à l'opacité » ou encore « Mon métier : informer et non pas désinformer » ont scandé hier une centaine de journalistes devant le siège de la télévision publique à Alger. Abdelmadjid Benkaci, journaliste à Canal Algérie, l'une des premières chaînes publiques du pays, a pris part à ce rassemblement. Sa chaîne n'avait pas parlé des manifestations du 22 février.
« Il fallait en principe diffuser des images de ces événements sur la télévision nationale. Nous sommes une télévision publique et il est de notre devoir de faire un service public sans prendre de position aucune, c'est juste rapporter une réalité du terrain. Pour le peuple algérien. Cela s'est traduit par un sit-in de près de 45 minutes avec la participation de plus d'une centaine de journalistes de la télé avec des slogans demandant plus de libertés de diffuser ce qui se fait, ce qui se dit chez nous. Je crois que c'est une première par rapport à une télévision publique. C'est un ras-le-bol. Il fallait faire ça parce que le public nous regarde. »