Le Programme alimentaire mondial (PAM) lance un appel aux dons. Depuis les années 70, cette agence des Nations unies finance des cantines scolaires sur l’île, dans le but de fournir aux enfants au moins un repas par jour. Depuis trois ans, les efforts sont essentiellement concentrés sur le Grand Sud, victime d’insécurité alimentaire sévère. Or depuis janvier, l’ONG manque de ressources pour pouvoir fournir les 300 000 repas quotidiens aux élèves. Six enfants sur dix n’y ont plus accès. Une situation alarmante qui pose question quant au fonctionnement de l’institution.
Serait-ce parce que cela fait dix ans maintenant que la situation alimentaire dans le Grand Sud est problématique qu’elle en arrive à ne plus alarmer ? Peut-être. Aujourd’hui, 27 février 2019, 400 000 habitants de la zone sont au bord de la famine. Le phénomène climatique El Niño, la sécheresse, les habitudes culturales, et le manque de programmes de développement sont autant de facteurs qui expliquent la difficile résilience de la population. « Depuis trois ans, la situation alimentaire des régions Anosy, Androy et Atsimo Andrefana n’a connu aucune amélioration », reconnait-on au sein du PAM.
Ainsi, les cantines scolaires, pourtant programme phare du PAM (9,8 millions de dollars, soit presque la moitié du budget de développement de 2018), tournent au ralenti. Il manque quatre millions de dollars pour pouvoir continuer à distribuer 300 000 repas quotidiens jusqu’à la fin de l’année scolaire.
Cercle vicieux
Les conséquences vont au-delà du problème alimentaire, explique Moumini Ouedraogo, le représentant du PAM à Madagascar. « La cantine scolaire, c’est un facteur de motivation des parents pour envoyer leurs enfants à l’école. Aujourd’hui, puisqu’il n’y a plus de repas distribués dans certaines écoles, les parents préfèrent garder leurs enfants et les utiliser à autre chose. Donc, on assiste déjà, d’après les instituteurs, à de la déscolarisation. A long terme, les écoles risquent de se vider, et ce sera un cercle vicieux pour la suite. »
Alors comment le PAM en est-il arrivé à une telle situation ? Moumini Ouedraogo rappelle que son agence ne bénéficie pas de ressources propres (contrairement à d’autres agences onusiennes comme l’Unicef), mais fonctionne uniquement grâce aux contributions des Etats, de la société civile ou du privé.
« La "cantine scolaire" est considérée comme un programme de développement. Or, dans l’ensemble, Madagascar est un orphelin en termes de contributions pour les programmes de développement. Même si la situation est en train de changer, il y a une tendance qui est que beaucoup de donateurs sont prêts à donner quand il y a urgence et très peu de contributions pour le développement. Or nous pensons qu’il faut changer complètement cette mentalité pour voir des changements sur la durée. Mais tant que l’on recevra seulement de l’argent pour gérer les situations d’urgence, on ne pourra pas changer la situation. Ce n’est que si l’on reçoit des fonds pour investir dans le développement sur le long terme, que l’on arrivera à changer la donne. »
Aujourd’hui, seulement 7% des élèves malgaches bénéficient de repas à l’école … et ce malgré le fait qu’il ait été démontré lors de récentes études que l’alimentation scolaire est un investissement rentable pour le développement du pays.