Une première en République Démocratique du Congo, les étudiants ainsi que les enseignants peuvent désormais accéder gratuitement à une bibliothèque en ligne. La disponibilité des ressources pédagogiques, ouvrages et articles scientifiques ne pourra plus poser problème au personnel enseignant ainsi qu’aux étudiants.
Officiellement, cette bibliothèque en ligne a été lancée le 20 octobre 2022 par le ministre de l’Enseignement Supérieur et Universitaire (ESU). Pour le ministre Muhindo Nzangi Butondo, le lancement de cette bibliothèque s’inscrit dans le cadre de la poursuite des réformes de l’enseignement supérieur et universitaire en RDC. Des réformes qui visent à former des personnes prêtes à être utiles sur le marché de l’emploi et non de simples théoriciens. D’où la migration vers le système d’enseignement anglais LMD (Licence-Maîtrise-Doctorat) qui est beaucoup plus pratique.
« C’est le plus beau cadeau que le gouvernement donne à l’Enseignement Supérieur et Universitaire, le LMD est une grande réforme que nous avons lancée et cela doit être accompagné des éléments nécessaires tels que la bibliothèque numérique. Nous profitons de cette occasion pour encourager les étudiants à s’adapter à la culture de recherche et les enseignants à actualiser les cours », a indiqué Muhindo Nzangi Butondo.
Ce qu’il faut pour accéder à ce portail numérique…
Le portail numérique pour accéder à cette bibliothèque numérique gratuite est www.bnn.ac.cd. Par contre, avant tout il faut se procurer une carte Sim « Airtel Academia », a fait savoir le ministre de l’enseignement supérieur et universitaire. Il n’y a qu’avec cette carte Sim qu’il est possible de consulter gratuitement les ouvrages mis à la disposition du monde universitaire de la République Démocratique Congo.
« Il s’agit des ressources des millions de livres pour accéder aux livres, grâce à Airtel, il faut simplement avoir un smartphone ou un ordinateur pour accéder à cette bibliothèque en ligne », a souligné le ministre Muhindo Nzangi Butondo.
Le ministre Muhindo Nzangi Butondo a également martelé que d’ici le début de la prochaine année académique, chaque étudiant devra obligatoirement avoir un ordinateur et/ou un smartphone. Ces outils de nouvelles technologies de l’information et de la communication sont indispensables pour accéder à la bibliothèque en ligne mais aussi le monde actuel de l’emploi exige leur maîtrise. « Chaque étudiant doit avoir un ordinateur et un Androïd (ndlr Smartphone), pas seulement pour accéder à la bibliothèque numérique mais parce que les emplois de demain exigent la maîtrise de l’informatique », a expliqué Muhindo Nzangi Butondo.
Des ordinateurs seront distribués aux étudiants à crédit et le remboursement sera effectué mensuellement tout au long de l’année à raison de 15 dollars américains par mois. Un lot de 150 000 ordinateurs déjà disponibles sera distribué dès le début de l’année académique 2022-2023.
Des contraintes…
Avec 26 provinces et une superficie de 2.345 409 kilomètres carrés, aucun réseau de téléphonie mobile ne couvre entièrement tout le pays. Akilimali Linjanja Wilfrid, représentant les étudiants de la province du Nord-Kivu demande au ministre de l’enseignement supérieur et universitaire de tenir compte des zones inaccessibles par le réseau Airtel.
« Aussi, on veut savoir si Airtel est le seul réseau auquel on peut connecter les étudiants ? Parce qu’il y a plusieurs zones qui ont du mal à avoir une bonne connexion avec ce réseau, dit-il. Pourquoi ne pas prendre les autres réseaux de téléphonie mobile au pays pour faciliter les étudiants de ces zones où la connexion Airtel n’est pas souvent bonne ? Mais, je peux dire que la démarche est bonne, chercher à connecter tous les étudiants c’est déjà une bonne démarche » ; s’interroge Akilimali Linjanja Wilfrid.
Au sujet de la distribution des ordinateurs à crédit, il faudrait que l’autorité de tutelle tienne compte de la situation socio-économique du pays. Spécialement pour la partie Est de la République Démocratique du Congo où sévissent des groupes armés depuis plusieurs décennies, estime Akilimali Linjanja Wilfrid.
« Les familles sont affectées et les étudiants sont aussi indirectement affectés par cette situation. Allons par exemple à Jomba dans le Rutshuru, les parents qui ne travaillent pas, et puis leur demander de payer une machine ordinateur à 150$ ou plus, ce n’est pas évident (…) Je crois que cette mesure ne semble pas être en conformité avec la réalité socio-économique de notre pays. A moins que le ministère rassure qu’il y aura des machines qui seront distribuées gratuitement aux étudiants démunis parce que dire que ce sera déjà en application cette année, c’est grave », s’est-il inquiété.
La documentation en ligne peut-elle remplacer la bibliothèque traditionnelle ?
La culture de la lecture des ouvrages en dur disparaît petit à petit des habitudes des étudiants. Vu l’évolution et la révolution des moyens technologiques de documentation, plusieurs ouvrages sont accessibles en ligne. Par ailleurs, cette facilité d’accéder à la documentation à tout moment éloigne petit à petit les étudiants de la bibliothèque.
Chokola Bushunju, étudiant en première année génie civil à l’Université Libre des Pays des Grands Lacs (ULPGL), n’a jamais été au sein de la bibliothèque de son université. Lui, il ne consulte qu’en ligne tous les ouvrages dont il a besoin pour sa formation et son apprentissage. Il précise qu’on visite gratuitement certains sites. Il suffit juste d’avoir un forfait internet. « Des sites gratuits qui mettent sur internet des ouvrages sont nombreux. Moi, je trouve qu’aller à la bibliothèque me fait perdre beaucoup de temps. Je peux tout avoir sur mon téléphone et sans me déplacer ».
Par ailleurs, la bibliothèque physique reste l’une des sources fiables pour les étudiants et chercheurs, affirme Jean-Claude Nondo que nous avons interrogé dans sa bibliothèque presque vide de lecteurs.
« Il est difficile de totaliser vingt lecteurs en une journée, mais ceux-là qui viennent consulter les ouvrages, on sent en eux le goût d’apprendre. Ici, c’est vraiment très calme, si quelqu’un veut être à l’abri des distractions, il doit s’orienter à la bibliothèque. Il y a un silence qui permet de se concentrer. Comme vous l’avez remarqué, ma bibliothèque est presque vide. Je conseille toujours aux étudiants de lire des ouvrages en dur, parce que là je suis sûr à quatre-vingt pourcent que l’idée générale du livre reste dans la tête de l’étudiant ».
Actuellement, l’un des défis auxquels font face certains étudiants qui veulent se documenter dans des bibliothèques reste l’accès à des ouvrages de leurs domaines d’étude et de recherche. Dans certains domaines comme les sciences de l’information et de la communication, l’agronomie… Les ouvrages sont rares et leur prix n’est pas à la portée des étudiants et de certains établissements d’enseignement. Plusieurs universités, faute de moyens, ne mettent pas régulièrement leurs bibliothèques à jour.
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Augustin SADIKI