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POLITIQUE

Mgr Fridolin Ambongo : « Quelle que soit la nature de votre coalition, souvenez-vous que le peuple veut un changement »

Plus de cinq mois après l’investiture du Président Félix Tshisekedi, la RDC n’a toujours pas de gouvernement, alors que le Premier ministre a été nommé depuis le 20 mai dernier. Une situation que déplore Mgr Fridolin Ambongo : « Nous attendons la composition du nouveau gouvernement. Ça ne sort pas, ça signifie qu’ils n’arrivent pas à se mettre d’accord ». Dans une interview exclusive accordée mercredi 3 juillet à la Radio Vatican, il estime que l’ancien régime contrôle encore l’essentiel du pouvoir et que le Chef de l’Etat n’a pas « une coudée franche ». 

Mgr Ambongo appelle Félix Tshisekedi à travailler avec ses anciens amis de l’opposition et d’accomplir son rêve : le peuple d’abord. « Ne bloquez pas la volonté du peuple au changement », prévient Mgr Fridolin Ambongo. Interview.

Radio Vatican : Le peuple compte beaucoup sur la voix des évêques. Quand vous avez parlé avec le Président de la République, quelle impression vous avez personnellement.

Mgr Ambongo : personnellement, la situation est préoccupante, mais nous comme pasteur, nous nous sommes dits que nous ne nous accrochons pas à l’histoire. Nous prenons le pouvoir tel qu’il est et voir comment tirer le meilleur pour le peuple de Dieu avec ceux qui sont aux affaires. Et c’est avec cet espoir que nous sommes allés échanger avec le Chef de l’Etat, et je dois dire qu’il voit les choses sous le même angle que nous. Il est disposé à travailler avec nous, à collaborer avec nous, pour réaliser ce qu’il avait toujours comme rêve : le peuple d’abord, qui était le slogan de son défunt père. Nous constatons aussi que le président actuel n’a pas la coudée franche pour mettre en application sa politique. L’ancien régime contrôle encore l’essentiel de levier de pouvoir, en commençant par le Parlement, la CENI, la Cour constitutionnelle, la police, l’armée et les services secrets et nous nous demandons ce qui reste au nouveau président. C’est pourquoi nous attendons la composition du nouveau gouvernement que nous attendons depuis six mois. Ça ne sort pas ça signifie qu’ils n’arrivent pas à se mettre d’accord. Mais nous comme Eglise, nous avons dit que nous devons le soutenir parce qu’il veut travailler pour le peuple, et c’est l’intérêt du peuple qui nous intéresse.

Pour aider le nouveau président, les évêques ont-ils des idées pour débarrasser le pays de l’ancien système que vous venez d’énumérer pour aider le nouveau président à avoir les mains libres ?

Nous avons deux leviers. Le premier, c’est la collaboration ordinaire entre l’Eglise et le pouvoir comme ça a toujours existé. Pour ça, nous avons demandé au Chef de l’Etat de finaliser l’accord cadre entre le saint siège et la RDC, qui est sur son bureau. Il n’a qu’à signer, parce que le document a déjà franchi toutes les étapes. Nous l’avons encouragé à le faire. Il nous l’a promis. Nous pouvons aussi l’aider d’une autre manière. Vue la délicatesse de sa situation actuelle, il a tout intérêt à travailler avec ses collaborateurs d’hier de l’opposition, qui sont encore là. Je pense qu’il commettrait une grosse erreur s’il tourne le dos à ses amis d’hier. Ça le fragiliserait vis-à-vis de son allié au sein du pouvoir actuel, le FCC.

L’Église avait des moyens pour mettre pression sur l’ancien régime. Est-ce que ce mécanisme ne peut pas continuer afin de bien libérer le pays ?

Nous travaillons pour ça, parce que le pays n’est pas suffisamment libéré, mais en même temps, nous estimons que quelles que soient les actions que l’Eglise pourrait mener demain, mais s’il n’existe pas une vraie justice qui est la colonne vertébrale d’un Etat, en dépit de toutes les initiatives que nous prendrons, rien ne va marcher, si le juge est lui-même corrompu. Nous pensons qu’en plus des pressions que nous pouvons encourager à la base, il faudrait que l’Etat ait ses attributs. On reconnait un Etat moderne et respectable s’il y a une justice qui fonctionne. Or, aujourd’hui au Congo, c’est la justice qui est la risée de tout le monde.

Une phrase interpelle dans votre message : « il ne faut pas bloquer le changement ». Pourquoi avez-vous choisi cette petite phrase ?

Ça signifie la synthèse de la situation que nous vivons. D’un côté, le peuple a choisi massivement le changement, mais nous constatons, contrairement au choix du peuple, que c’est l’ancien système qui continue. Et nous rappelons à ceux qui sont là que quelle que soit la nature de votre coalition, souvenez-vous le peuple veut un changement et ne bloquez pas cette volonté du peuple au changement.

Avec Radio Vatican.

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