Chaque 19 novembre, le monde célèbre la journée mondiale des toilettes. À cette occasion, les étudiants du campus universitaire du lac à Goma dénoncent la saleté des toilettes. Ils disent être exposés aux maladies contagieuses. Les femmes sont les plus à risque.
À quelque cinq mètres du campus, une odeur nauséabonde vous envahit. La puanteur de l’endroit est telle qu’on se croirait dans une décharge de poubelles. « Il faut avoir un cœur dur pour entrer dans ces toilettes » s’inquiète Anne-Marie Bashizi, étudiante dans la faculté d’économie. Cette étudiante qui fréquente le campus universitaire du Lac depuis trois ans dit qu’elle ne fréquente ces toilettes qu’en cas d’extrême urgence.
«C’est risqué. Les filles peuvent contracter directement des infections sexuellement transmissibles (IST). Dans la société c’est une honte pour une fille d’avouer qu’elle a une infection de ce genre. C’est pourquoi vous ne les verrez jamais crier sur les toits. Elles sont nombreuses à avoir été infectées ici (…)», ajoute Mme Bashizi.
Aline Katungu, étudiante en démographie à l’Institut Supérieur des Statistiques et Nouvelles Technologies affirme n’avoir jamais fréquenté les toilettes de son établissement. Soucieuse de sa santé et de son bien-être, elle préfère négocier la toilette auprès des voisins aux alentours du campus.
« Je suis allé dans ces toilettes uniquement en première année de graduat et ce fut la dernière. Mon corps est très fragile. Je ne peux pas prendre le risque de m’exposer. Imaginez un peu, le campus qui sert de référence des établissements publics en province n’arrive pas à respecter les premières et les plus simples règles d’hygiène», déplore Aline Katungu.
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Chez les garçons, ils sont une dizaine à se soulager dans un urinoir d’au moins trois mètres de long tout usé. Contrairement aux toilettes pour filles, ici l’utilisation est régulière. Plusieurs ne viennent que pour uriner comme nous l’explique Jean Basabose, étudiant du Campus du Lac. Jean regrette que chaque fois qu’il revient des toilettes, il ramène des mauvaises odeurs dans l’auditoire.
«Nous sommes nombreux à n’ y aller que pour uriner. Si tu y passes plus de trois minutes, tu risques de tomber malade. D’ailleurs en revenant des toilettes tout le monde dans l’auditoire le sait vu le parfum que tu dégages», se lamente-t-il.
L’université de Goma héberge dans ses locaux plus de 8000 étudiants répartis en cinq instituts. Avec tout cet effectif, celle-ci comporte huit portes de toilettes. Connu sous le nom de «Kinyumba», les toilettes de cette dernière ont été construites en 2012 et n’ont jamais été renouvelées.
La valeur des toilettes
Selon une étude menée en 2020 par l’UNICEF-RDC, plus de 12 millions de congolais pratiquent la défécation à l’air libre. Cette agence onusienne de protection de l’enfance indique que ces chiffres pourraient doubler en 2030 si rien n’est fait.
A cet effet, investir dans l’assainissement est essentiel. Chaque dollar investi dans des services sanitaires élémentaires rapporte jusqu’à cinq dollars, grâce au recul des maladies et aux gains de productivité. Pour l’Onu, avoir des toilettes à la maison, à l’école et au travail aide les femmes et les jeunes filles à réaliser leur potentiel et à jouer pleinement leur rôle dans la société, indépendamment des menstruations et des grossesses.
L’édition 2021 de la journée mondiale des toilettes porte sur la valeur des toilettes et attire l’attention sur le fait que les toilettes et les systèmes d’assainissement auxiliaires souffrent d’un sous-financement, d’une piètre gestion et d’un désintérêt dans de nombreuses régions du monde.
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Augustin Sadiki