Qui dit Evra, dit Knysna. Alors que le fantasque défenseur met officiellement un terme à sa carrière, le temps est venu pour lui d’apporter quelques précisions sur cet événement qui a marqué le football français. « J’arrête, je dis stop. » A 38 ans, Patrice Evra a décidé de raccrocher les crampons pour de bon, près d’un an après la fin de son dernier contrat professionnel à West Ham. Dans des interviews accordées au Parisien et au Figaro, le trublion au palmarès bien fourni tire sa révérence ce lundi. Avec forcément quelques mots sur l’épisode de Knysna. Le fiasco sud-africain devenu indissociable de sa personne alors qu’il était capitaine de l’équipe de France lors de ce Mondial 2010 de triste mémoire. S’il a un regret dans cette histoire, c’est celui d’avoir voulu « tout prendre » sur ses épaules. »J’aurais dû laisser mon portable ouvert et écouter les avis de certains comme Didier(Deschamps). Je me suis mis dans une bulle, je ne savais pas quelles répercussions cela pourrait occasionner », souffle-t-il au Figaro. Et de charger le sélectionneur de l’époque, Raymond Domenech, dans des propos cette fois rapportés par Le Parisien. Le fameux communiqué au pied du bus annonçant la grève des Tricolores, « c’était à moi de le lire, estime Evra. Quand on était dans le car, j’ai ce papier dans la main. J’ai dit: ‘Raymond, on va aller signer des autographes aux gens, on remonte après et on rentre à l’hôtel’. Quand je lui dis ça, il me demande ce que je vais dire. Je lui donne le papier. Là, il le lit et ne me le rend pas. Je lui dit: ‘Les joueurs veulent que je le lise’. Et il refuse. Il me rétorque: ‘C’est moi qui vais le lire parce que vous êtes de petits gamins’. Je remonte dans le car, et les gars me demandent où est le papier. Et là ils me disent de descendre, d’aller le reprendre, qu’il ne va pas lire ce qu’on a écrit. Ils m’envoient au feu. Et au moment où j’allais descendre, Raymond était déjà en train de le lire… »Le poteau de Gignac…Pour autant, en dépit des conséquences désastreuses sur sa propre image et celle des Bleus, l’ancien Monégasque, Mancunien, Turinois ou Marseillais l’assure. « C’est passé. Il y a eu une histoire. Ça m’a fait mal. À la fin de la compétition, j’ai assumé. […] Certains pourront me juger, dire qu’en tant que capitaine je porte l’ensemble des responsabilités de tout ça. Ça ne hante pas mes nuits. La seule chose qui me hante, c’est quand la frappe de Dédé Gignac échoue sur le poteau en finale de l’Euro… » La seule et unique cicatrice qu’il garde de sa carrière, promet-il. « C’était ma dernière chance de remporter quelque chose avec mon pays. J’étais sûr à 1000% qu’on allait gagner. La seule fois où j’ai senti un coup foireux, c’est quand Cristiano Ronaldo se blesse en finale. J’ai regardé mes coéquipiers et j’ai vu qu’ils étaient soulagés. À la mi-temps, j’ai crié dans le vestiaire, je leur ai dit que je sentais le coup venir, que l’on n’était pas assez efficaces, que ça puait, qu’on se ch… dessus… » Avec le résultat que l’on sait (victoire et sacre du Portugal sur un but d’Eder dans le temps additionnel).De cette désillusion, Patrice Evra conserve une intime conviction. « J’avais la sensation que beaucoup de spectateurs étaient venus au Stade de France pour faire des selfies, pour dire qu’ils étaient là… Je ne critique pas, mais suis convaincu que si la finale se passe au Vélodrome, ce n’est pas la même chose. […] Lors de la demi-finale au Vél contre l’Allemagne, ça tremblait de partout. L’engouement était unique. » Reste pour l’intéressé le sentiment d’avoir participé malgré tout à la consécration mondiale de l’été dernier en Russie. « J’ai reçu tellement de messages que pour moi, c’est comme si je l’avais gagnée (la Coupe du monde, ndlr). J’ai fait le travail jusqu’à l’Euro, ils ont fait le reste. Plusieurs joueurs m’ont dit: ‘Pat, quand on fait certains discours, c’est comme si ton fantôme était dans le vestiaire’. Quand j’entends ça, j’ai gagné ! »