L’hôpital régional de Gitega, un épicentre dans la lutte contre la fistule obstétricale, rapporte une augmentation alarmante du nombre des victimes. On dénombre actuellement plus de 3600 cas et des nombreuses autres femmes, en proie à la maladie, restent isolées chez elles, faute de moyens de transport pour accéder aux soins.
Malgré les efforts intensifs pour combattre la fistule obstétricale, le Burundi fait face à une hausse préoccupante du nombre de cas de fistule obstétricale. Selon le dernier rapport de l’hôpital régional de Gitega, qui héberge le « Centre Urumuri » spécialisé dans le traitement de la maladie, le nombre de cas enregistrés depuis 2010 s’élève à 3666. La direction de cet hôpital souligne que de nombreuses autres femmes, en proie à la maladie, restent isolées chez elles, faute de moyens de transport pour accéder aux soins.
Le Dr Éric Ndihokubwayo, responsable de l’hôpital régional de Gitega, attire l’attention sur les défis majeurs auxquels le centre fait face notamment les ressources financières et techniques insuffisantes et des difficultés de transport pour les patientes. « Je plaide pour qu’il y ait un véhicule pouvant faciliter le transport de ces femmes le permettra d’arriver à l’hôpital », quête-t-il.
La fistule obstétricale : la pathologie handicapante des pauvres
Anatolie Bigirimana, originaire de la province de Makamba et victime de fistule obstétricale, témoigne de la difficulté de vivre avec cette maladie dans la communauté. Elle insiste sur la nécessité d’une assistance accrue et d’une prise en charge efficace.
La stigmatisation sociale, un autre visage de la maladie
La fistule obstétricale, au-delà de son impact physique, entraîne une stigmatisation sociale profonde. Partageant son expérience traumatisante, Anatolie Bigirimana restait dans l’isolement par honte de son état. « Je ne pouvais pas approcher les autres à cause de l’incontinence urinaire », indique-t-elle.
Cette stigmatisation est confirmée par le Dr Ndihokubwayo, qui rapporte des cas de femmes ostracisées par leurs familles et leurs communautés. «Les femmes victimes de fistule obstétricale sont stigmatisées par la communauté, leurs familles et quelque fois chassées de leurs ménages. Par conséquent, elles sont mentalement perturbées», renseigne-t-il.
En réponse aux traumatismes psychosociaux et chocs économiques des victimes, l’hôpital régional de Gitega a initié un programme de réintégration socioéconomique pour les victimes guéries. Ce programme vise à offrir des opportunités économiques, notamment par des fonds de démarrage pour des projets tels que l’élevage de lapins et de chèvres, facilitant ainsi leur indépendance financière et leur réintégration sociale.
Des appuis multiformes pour renforcer la lutte
Des efforts concertés sont menés en partenariat avec des agences des Nations unies au Burundi, notamment l’UNFPA et l’OMS, ainsi que la fondation Bonne Action Umugiraneza. Ces collaborations ont permis d’apporter une aide technique et financière cruciale, incluant des campagnes de sensibilisation, des équipements médicaux et une assistance médicamenteuse.
Burundi : La maladie fistule obstétricale gagne du terrain, l’Etat ne baisse pas les bras
Alors que la fondation Bonne Action Umugiraneza a facilité la construction d’un bâtiment spécialisé dans la prise en charge des victimes (Centre Urumuri), le Fonds des Nations Unies pour la Population contribue financièrement au bon fonctionnement de la maison. Ensuite, précise Dr Ndihokubwayo, il organise de campagnes de prise en charge des malades et apporte une assistance en médicaments et en équipements tels que les lits, les matelas et kits de dignités utilisés par ces femmes quotidiennement.
Quant à l’Organisation mondiale de la santé, poursuit-il, a apporté son assistance en équipements entre autres les appareils d’oxygénation, les masques médicaux, les oxymètres, l’échographe, les lits de réanimation pédiatriques et d’intrants.
«Ces équipements permettront une meilleure prise en charge des urgences obstétricales et néonatales », avait indiqué Dr Crespin Xavier, le Représentant de l’OMS au Burundi, lors de la remise de ces matériels à la fondation Bonne Action Umugiraneza au mois d’avril dernier.
La fistule obstétricale, souvent causée par des accouchements précoces ou prolongés, représente un défi de santé publique majeur au Burundi. Les coûts de traitement, estimés à environ 800 dollars américains par cas, ainsi que les impacts psychosociaux, nécessitent une attention et des ressources accrues pour éradiquer efficacement cette maladie et réintégrer les victimes dans la société.
Prosper Aobe