Des artistes ivoiriens ont parcouru 2.500 km à travers leur pays pour parler de paix et de réconciliation.
A bord d’un grand bus aux couleurs de la Fondation Magic System et de l’Union Européenne, une trentaine d’artistes ivoiriens ont sillonné la Côte d’Ivoire dans le cadre de l’UE-Magic Tour 2019.
Ils étaient porteurs d’un message de paix et de réconciliation, à moins d’un an de la présidentielle de 2020.
L’UE-Magic Tour 2019, une tournée organisée par l’Union européenne et le célèbre groupe de zouglou ivoirien Magic System avait pour but de « partager des valeurs » autour de plusieurs thématiques.
Protection de l’environnement, dialogue des peuples, autonomisation des femmes et des jeunes mais l’actualité politique et le passé récent de la Côte d’Ivoire ont remis la question de la paix et de la réconciliation au cœur de cette tournée artistique et culturelle.
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L’influence des artistes au service d’un message de paix, une stratégie qui à chaque étape a mobilisé des centaines de jeunes, d’hommes et de femmes.
Ces populations étaient certes venus apprécier des artistes qu’ils écoutent au quotidien mais aussi partager avec les organisateurs leurs attentes concernant la paix dans leur pays.
« Partout où nous sommes passés, dans chaque ville où nous avons fait escale, nous avons rencontré des Ivoiriens qui ont soif de paix et qui veulent éviter à leur pays une nouvelle situation de crise » explique Jean Louis Boua, directeur exécutif de la Fondation Magic System.
Les Ivoiriens gardent un mauvais souvenir de la crise post-électorale de 2010-2011 avec ses 3.000 morts.
Entre 200 et 300 mille personnes sont venus écouter des messages de paix lancés par la star du coupé-décalé Safarel, la chanteuse-actrice-animatrice Daysie, l’humoriste Amiral Enk2K ou encore la vedette du Zouglou Molière.
« Les populations que nous avons croisées sont réellement conscientes que sans la paix rien ne peut être réalisé dans le pays et dans leurs communautés pour leur bien-être. Sans la paix, pas d’éducation, de santé, de route…pas de développement » rappelle M. Boua.
Et justement pour parler de cette paix aux populations, la stratégie a certes consisté à utiliser la musique à travers des concerts et des rencontres sportives mais aussi aller à la rencontre de l’Ivoirien là où il se trouve.
« Nous sommes allés rencontrer des jeunes, des femmes, des artisans…. On a parlé avec tout le monde. Nous sommes allés dans des recoins, des lieux improbables. Dans les villes mais et des villages avec des problèmes d’adduction d’eau, de fourniture d’électricité », précise A’Salfo leader de Magic System.
Ces rencontres avec les populations ont donc été organisées entre les artistes qui sont parfois restés plusieurs jours au même endroit pour mieux comprendre les préoccupations de leurs compatriotes.
Les échanges avec les populations ont été francs en dépit de quelques ressentiments qu’il fallait dissiper.
Ce fut le cas à Béoumi, localité du centre de la Côte d’Ivoire, théâtre de violences intercommunautaires ayant fait une dizaine de morts en mai.
« Des jeunes nous ont dit qu’ils étaient pour la paix mais exigeaient comme contrepartie la libération de leurs amis. Nous avons été clairs envers eux en leur indiquant qu’il ne peut y avoir de paix véritable si chacun impose une condition » indique Jean Louis Boua, directeur exécutif de la Fondation Magic System.
A Béoumi « des gens disaient ‘on va faire la paix mais il y a des conditions, il y a un prix’. Mais au fur et à mesure de la discussion, on a pu faire comprendre qu’il n’y avait pas de condition, pas de prix. Et le soir, on a eu un concert. Tout le monde était là sans aucun problème. C’était extraordinaire », assure l’ambassadeur de l’Union européenne Jobst von Kirchmann.
Au regard du discours politique et des tensions entretenues sur les réseaux sociaux, beaucoup craignent des violences lors de la présidentielle de 2020.
Dans ce contexte, l’idée de l’UE-Magic Tour 2019 était de rappeler aux Ivoiriens que le vivre ensemble doit prévaloir au-delà de l’appartenance politique, des convictions religieuses et des origines.
« On n’a pas la prétention de dire qu’avec une tournée on peut éradiquer toutes les petites rancunes, les guéguerres. Mais on aura semé une petite graine d’amour, de solidarité, d’union entre les gens », estime A’Salfo.
Une petite graine d’amour appelée à germer dans le cœur de chaque Ivoirien pour éviter des tensions lors de la présidentielle de 2020 et d’ici là des affrontements intercommunautaires.