Un reportage d’Alexandrine Holognon
En plein cœur du grand marché de Dakar, se trouve la fabrique artisanale de Sandaga.
Dans cette bâtisse de trois étages, le wax et d’autres pagnes locaux sont sublimés, cousus et transformés en tenues, en objets d’art et de décoration.
Dès le rez-de-chaussée, le visiteur est happé par cet univers coloré, mais aussi les appels et plaisanteries des commerçants.
Lire aussi:
Dans cette galerie, on se faufile à travers les stands et les ruelles exiguës et remplies d’articles. Les occupants de cet espace sont des artisans, dos courbés sur leurs machines, ou des vendeurs qui montrent les produits aux clients.
« Tout ça, c’est travaillé ici ! Ce n est pas des chinoiseries. C’est travaillé à l’africaine », déclare notre guide, Djibril, qui travaille dans cette fabrique depuis cinq ans.
Regarder aussi:
La fabrique artisanale est un endroit où il vous faut prendre votre temps. Du temps pour déambuler à travers les stands. Et à chaque arrêt, les commerçants proposent des bancs où s’assoir. Ce sont les fauteuils du marché, disent-ils.
Il faut surtout du temps pour découvrir les articles, marchander et plaisanter avec les artisans. L’accueil est chaleureux dans ce repaire de touristes. On les rencontre au détour des stands, occupés à essayer des tenues ou à marchander.
Lire aussi sur le mannequinat:
« Ce serait plus simple si il y avait des prix fixes. Quand tu entres ici, tu as l’embarras du choix », explique un touriste.
Certains clients disent apprécier le rapport qualité-prix, mais une cliente explique qu’il faut connaître les prix à l’avance pour bien marchander et tirer son épingle du jeu.
« Je viens acheter des tissus à ramener chez moi, pour ma petite famille. L’Afrique, c’est la tendance maintenant. Donc, je ramène souvent des pagnes pour faire un pantalon pour moi et un autre pour ma femme », dit un touriste.
Lire aussi:
- Rihanna, première femme noire à la une de Vogue UK
- Naomi Campbell pour une version africaine de Vogue
Copyright de l’image BBC/Alexandrine Holognon
Dans la fabrique artisanale de Sandaga, on parle plusieurs langues. Le pular, le bambara, le wolof et le français se côtoient.
Cela s’explique par le fait que la fabrique a été fondée par des ressortissants guinéennes d’ethnie peule, dans un milieu wolof, à savoir la ville de Dakar.
L’un de ses fondateurs, Ousmane Barry, raconte qu’ils réfléchissaient au début aux moyens à recourir pour développer le marché.
« On est bien structurés… Chacun respecte l’autre, et on a la paix avec tout le monde », ajoute-t-il.
Ousmane Barry vit au Sénégal depuis douze ans. Il a quitté la Guinée, sa terre natale, avec son père, en quête de bien-être.
Les récits de ceux qui partagent ce bâtiment se ressemblent, car ils pour la plupart des Guinéens venus au Sénégal dans l’espoir d’un meilleur avenir.
Lire aussi:
- La créatrice Sénégalaise Adama Paris : « En 17 ans, on n’a eu aucun investisseur »
- Les mannequins jumeaux congolais veulent changer le monde de la mode
Copyright de l’image BBC/Alexandrine Holognon
« Il y a les nouveaux venus. Nous les accueillons et les aidons à combattre la pauvreté », explique Ousmane, louant la solidarité dont les artisans font preuve les uns envers les autres.
Les aînés s’occupent de l’accueil et de l’intégration des cadets. Ils les initient au métier pour leur permettre de gagner dignement leur vie et les détourner de la délinquance ou de l’immigration clandestine.
Plus de 500 Guinéens travaillent dans la fabrique artisanale. Ces tailleurs, apprentis et revendeurs louent leurs stands exigus à des prix variant entre 30 000 et 40 000 francs CFA par mois.
Chacun fait de son mieux pour engranger du profit à la fin de la journée. Il est difficile d’avoir des chiffres précis sur les bénéfices des artisans, dont une partie est envoyée aux familles restées au pays.
Lire aussi:
- Jekkah à la mode de deux mondes, la Gambie et l’Angleterre
- En Colombie, la mode à l’épreuve des balles
Certains artisans restent nostalgiques de la vie en Guinée.
Hormis les vendeuses ambulantes, qui proposent galettes et rafraîchissants, les occupants de la fabrique de Sandaga sont presque tous des hommes.
Qu’est ce qui explique cela ? Djibril, notre guide, affirme que les métiers pratiqués ici sont « trop durs » pour les femmes.
Il faut signaler que les quelques femmes présentes proposent à la clientèle des pagnes teintés, fabriqués par des Sénégalaises et transformés en divers objets.
Regarder aussi: