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Ces jeunes Algériens qui n’ont connu qu’un président toute leur vie

M. Bouteflika a dirigé l'Algérie pendant 20 ans - ce qui, dans un pays où l'on estime qu'environ 70% de la population a moins de 30 ans - fait de lui le seul président que de nombreux algériens aient jamais connu. Copyright de l’image EPA
Image caption M. Bouteflika a dirigé l’Algérie pendant 20 ans – ce qui, dans un pays où l’on estime qu’environ 70% de la population a moins de 30 ans – fait de lui le seul président que de nombreux algériens aient jamais connu.

Abdelaziz Bouteflika, le président algérien de 82 ans, malade, a remis sa démission en direct à la télévision le 2 avril au soir, au grand soulagement de la jeunesse algérienne, en tête de toutes les manifestations.

Contrairement aux précédentes promesses de démission, elle n’a pas tardé cette fois-ci à se réaliser immédiatement.

Frêle et silencieux, ce sont les images d’un président affaibli. Des images publiques rares depuis son AVC en 2013. Abdelaziz Bouteflika est désormais partiellement paralysé et a de sérieuses difficultés à s’exprimer.

Cette démission fait suite à six semaines de manifestations pacifiques dans tout le pays. En tête des cortèges, des jeunes disciplinés en matière de nettoyage et ne manquant pas d’humour.

Abdelaziz Bouteflika a dirigé l’Algérie pendant 20 ans – ce qui, dans un pays où l’on estime qu’environ 70% de la population a moins de 30 ans – fait de lui le seul président que de nombreux algériens aient jamais connu.

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 »Un de moins »

Nourhane Atmani, 19 ans, raconte à BBC News qu’elle a assisté à presque toutes les manifestations.

« Les deux dernières semaines m’ont causé, ainsi qu’à des milliers d’autres Algériens, beaucoup d’anxiété et de colère « , dit-elle. « Alors aujourd’hui, se réveiller en sachant que nos efforts n’ont pas été vains a été une libération. Nous attendions ce moment depuis longtemps. »

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Lorsque M. Bouteflika est arrivé au pouvoir pour la première fois en 1999, l’Algérie était au milieu d’une guerre civile sanglante qui a commencé en décembre 1991 et s’est achevé début 2002.

Depuis, il a été vu comme celui qui a rétabli la paix dans le pays.

Nourhane Atmani estime que c’est la raison pour laquelle, les générations précédentes, lui ont permis de rester au pouvoir aussi longtemps.

Copyright de l’image Nourhane Atmani

Image caption Nourhane Atmani :  »Quand il a annoncé sa démission, j’ai soufflé pour la première fois. Un de moins ».

« Enfant, chaque adulte qui m’entourait le glorifiait, comme s’il était une sorte de dieu qui a sauvé la nation du terrorisme, c’est le sauveur que tout le monde attendait après dix longues années de[conflit] » constate-t-elle.

 » Plus âgée, j’ai commencé à être politisée, honnêtement j’étais en colère contre la génération précédente – ce sont eux qui l’ont fait passer pour un saint. Ce sont eux qui l’ont maintenu au pouvoir et lui ont donné la confiance nécessaire pour ne jamais se retirer » poursuit-elle.

Elle ajoute qu’avec la vieille garde toujours bien en place, les protestations ne s’arrêteront pas pour autant.

 »Quand il a annoncé sa démission, j’ai soufflé pour la première fois. Un de moins ! » raconte-t-elle.

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De la désillusion à l’espoir

Abdellah Djelti, 27 ans, est aussi d’accord pour dire que M. Bouteflika a été considéré comme  » un chevalier blanc, un sauveur  » pour l’Algérie dans les premières années de sa présidence.

« L’Algérie dans la guerre civile, c’était un désastre », confie-t-il à la BBC. « Les gens ne pouvaient pas sortir – lorsque tu sortais… tu trouvais des corps dehors. »

Selon lui, Abdelaziz Bouteflika a toujours été considéré comme l’homme qui a mis fin à cette situation.

Mais après quatre mandats marquées aussi bien par la corruption, les allégations de fraude électorale que l’absence de plus en plus manifeste d’un président malade, la frustration finit par gagner les Algériens.

Copyright de l’image AFP

Image caption Frêle et silencieux, ce sont les images d’un président affaibli, des images publiques rares depuis son AVC en 2013.

Au lieu de rester prisonniers du passé, ils souhaitaient tout simplement un chef de file qui puisse les mener vers l’avenir – par exemple, en investissant dans l’éducation.

« La plupart des diplômés des universités n’ont pas d’emploi, explique Abdellah Djelti, parce que le gouvernement n’accorde pas d’importance aux études, à l’éducation des gens ou encore à la recherche scientifique ».

L’étudiant en littérature anglaise ajoute qu’il n’existe que peu ou pas de programmes pour aider les étudiants qui poursuivent leurs études à l’étranger et que le coût est élevé pour la majorité des jeunes Algériens.

« J’ai rêvé d’étudier à l’étranger, en Angleterre ou aux États-Unis, de visiter d’autres pays. J’ai ce rêve de visiter d’autres musées parce que j’ai une passion pour l’art et l’histoire « , raconte-t-il.

« Mais comme la situation ici [avec le gouvernement] est très mauvaise…. Je n’ai rien pu faire de tout ça. »

Copyright de l’image AFP

Image caption Cette démission fait suite à six semaines de manifestations pacifiques dans tout le pays.

C’est en partie pour cette raison qu’il a manifesté pendant près de deux mois. Le jeune homme est passé du sentiment que rien ne pourrait jamais changer… à l’espoir:

« Ce qui est bien, c’est que c’était très pacifique, les gens donnaient de l’eau, de la nourriture… J’avais la fibre patriotique, je demandais que nos droits et notre voix soient entendus. »

« En ce moment en Algérie, le drapeau algérien est toujours dans ta poche – parce que tu ne sais pas quand tu finiras dans une manifestation » ajoute-t-il dans un éclat de rire.

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Le  »plogging » à la sauce algérienne

Nacerddine Rahmoune, un militant de 23 ans originaire de Sidi Bel Abbès, a même initié les manifestants à une tendance suédoise appelée  » plogging « .

L’idée du  »plogging » est de ramasser les déchêts dans la rue et faire son jogging en même temps. Nacerddine Rahmoune a recyclé l’initiative pendant les marches des manifestants.

Copyright de l’image Nacerddine Rahmoune

Image caption Nacerddine Rahmoune, en bas, second en partant de la gauche.

« Nous avons réutilisé le même concept en lui donnant une touche algérienne », explique-t-il à la BBC. Le but était d’ « inculquer une conscience environnementale », tout en adhérant à l’appel pour « un nouveau système [politique] ».

Et maintenant ?

Même si Abdelaziz Bouteflika s’est retiré, il est évident que les manifestations sont loin d’être terminées.

« C’est effrayant », dit Nourhane Atmani. « Je suis heureuse que [les Algériens soient maintenant] éveillés, mais j’ai aussi peur qu’il y ait un grand clivage quand il s’agira de choisir qui va devenir le président. »

Nacerddine Rahmoune partage le même point de vue, mais il est plus optimiste pour l’avenir :

« Nous espérons voir de nouveaux visages et davantage de jeunes au parlement, nous avons encore beaucoup à faire ».

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